Vivre un choc émotionnel post-traumatique au cabinet

  • Publié le . Paru dans Profession Assistant(e) Dentaire (page 37-38)
Information dentaire
La vie n’est jamais un long fleuve tranquille, même quand on aime son travail. Patricia en sait quelque chose : l’ambiance paisible qui régnait dans son cabinet s’est noircie subitement, à la suite d’un incident éprouvant. Elle se confie à nous sur ce qu’elle a vécu comme un choc émotionnel.

Patricia adore son métier de secrétaire dentaire. Pour elle, ce n’est pas un simple « boulot » mais un investissement personnel. Plus importante encore que les tâches administratives, la dimension relationnelle est très présente, avec les patients, mais aussi au sein de l’équipe – praticiens, assistantes, secrétaire. Avec ses douze ans de métier, Patricia connaît parfaitement les besoins et problèmes de son praticien. Elle sait anticiper les contraintes de dernière minute. Des compétences saluées par la participation de tout le cabinet à des congrès internationaux. Le regard de Patricia s’allume quand elle évoque ses souvenirs de Londres, Venise et Marrakech.

Alors certes, dans le quotidien bien chargé de tout cabinet dentaire, il y a des hauts et des bas. Patricia s’en accommode avec philosophie : « On trouve toujours une solution, une sortie de secours, un compromis. Tout compte fait, les ennuis restent derrière nous, comme de mauvais souvenirs qui s’effacent avec le temps. » Mais parfois, la goutte fait déborder le vase…

Quand tout bascule

C’était un jour ensoleillé de printemps. Un mercredi comme les autres dans ce cabinet d’orthodontie, un ballet incessant de jeunes patients. « Je suis en train de donner un rendez-vous à un patient, quand quelqu’un m’interpelle. Je relève la tête et vois trois personnes en costume-cravate, comme on en voit rarement au cabinet. Je pense avoir affaire à des délégués médicaux. Après s’être présentés brièvement, ils demandent à voir mon praticien, qui les reçoit immédiatement. Je reprends sans attendre mon travail, et la matinée se passe sans que j’aie le moindre doute de ce qui se trame. »
Car voilà : en fait de représentants médicaux, ces personnes sont des délégués de l’ARS (Agence régionale de santé) qui, conformément à la procédure, viennent faire une visite suite à la plainte d’un patient. Une plainte qui s’avérera non fondée, mais fera l’objet d’un contrôle long et méticuleux. Une chape de plomb tombe sur les épaules du praticien et de son équipe.

Émue, Patricia se souvient : « L’ambiance devient tendue, pesante. Du jour au lendemain, je dors moins bien, je traîne les pieds pour partir de chez moi le matin. Qu’est-ce qui m’arrive ? Pourquoi, tout à coup, je doute de moi, de mon travail ? » Son cerveau semble fonctionner au ralenti, elle n’arrive plus à se concentrer. Au bout de quelques semaines, elle ressent des tensions musculaires que rien n’apaise, et des problèmes digestifs qui nécessiteront un traitement médical quotidien. Même à la maison, l’ambiance s’en ressent. Et Patricia n’est pas la seule à vivre ce choc émotionnel : toute l’équipe en souffre. « Même si la définition du choc émotionnel, en psychologie, correspond aux conséquences d’un événement traumatisant comme un deuil, une déception amoureuse ou un problème familial, il peut aussi, selon moi, survenir dans le domaine professionnel », souligne Patricia.

Thérapie collective

Le praticien, premier concerné par les circonstances, prend les choses en main. Il choisit d’inviter une coach au cabinet. L’équipe est dubitative, mais elle sera sauvée par le « leadership collaboratif » (voir encadré ci-contre), une technique de renforcement de la cohésion et de l’harmonie, à travers le jeu. Après quelques semaines, tout le monde respire. Les tensions sont dénouées. « Je me suis sentie valorisée, soulagée. J’ai nettement repris confiance en moi et dans mon travail. Notre coach a remotivé les troupes. Malgré notre pudeur, elle a su démêler, comprendre, mettre le doigt sur le mal-être qui nous envahissait. J’ai beaucoup pleuré, beaucoup ri aussi ! »
Aujourd’hui, cet épisode n’est plus qu’un mauvais souvenir. Ce qui n’a pas détruit l’équipe l’a rendue plus forte. « Cette nouvelle capacité à communiquer de façon efficace, avec clarté, et à savoir écouter l’opinion du groupe a contribué à améliorer de façon continue notre travail, à accentuer notre cohésion. » Est-ce pour autant un mal pour un bien ? Pas si sûr. C’est en tout cas une leçon de vie, nous dit Patricia. Une étonnante preuve que dans l’adversité, on se découvre des ressources insoupçonnées. Et un bel exemple de management bienveillant.
Le leadership collaboratif (cohésion et harmonie) a été déployé au cabinet par deux exercices :

Le bâton d’hélium

Cet exercice est simple, et pourtant puissant. Il aide les participants à intégrer la communication efficace, la coopération, la patience. On place un bâton ou une paille entre l’index de chaque participant et on détermine le « meneur ». Celui-ci doit convaincre son partenaire du bien-fondé d’une idée sans faire tomber le bâton. La clé du succès de cet exercice est la confiance en soi. Elle permet de communiquer adéquatement et de travailler ensemble et de vers un but commun.

L’autoévaluation de l’équipe
Les coéquipiers identifient les qualités qu’ils attribuent à l’équipe du cabinet, et les notent sur un papier. Ensuite, une mise en commun est faite à haute voix. L’exercice permet une prise de conscience de la valeur de chacun et de l’efficacité de l’équipe. Elle est également efficace pour identifier des problèmes cachés ou des conflits. « Une technique que l’on pratique trop peu souvent en France », regrette Patricia.

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