Le diagnostic d’une douleur non odontogène est difficile à poser, c’est le cas de l’odontalgie atypique qui peut être diagnostiquée à tort comme étant une douleur d’origine endodontique.
La confusion est d’autant plus dommageable qu’un traitement endodontique non indiqué risque d’aggraver les symptômes en intensité et en étendue et que ces patients ont plus de mal à accepter leur situation lorsqu’ils subissent des interventions dentaires multiples sans soulagement de la douleur. Les patients atteints d’odontalgie atypique présentent fréquemment des anomalies sensorielles telles que l’allodynie ; hyperalgésie et l’exacerbation de la douleur par des stimuli thermiques, mécaniques et/ou chimiques et ces anomalies peuvent être évaluées par des tests sensoriels quantitatifs.
Le but de cette étude est de quantifier la fonction somato-sensorielle des sujets atteints d’odontalgie atypique et des volontaires sains et de déterminer si ces tests peuvent aider à la reconnaissance des odontalgies atypiques. Les auteurs testent une méthode quantitative sur 60 sujets répartis en 3 groupes afin d’établir un diagnostic différentiel entre les pulpites irréversibles (n = 20 dont 14 femmes, âge moyen 35 ans) et les odontalgies atypiques (n = 20 dont 15 femmes, âge moyen 58 ans).
Le groupe contrôle est composé de 20 sujets dont 14 femmes (âge moyen 50 ans). Les tests suivants ont été réalisés : test de détection du seuil mécanique (application d’une force par le biais d’une fibre fine sur la muqueuse dans la zone douloureuse jusqu’à détecter une sensation tactile muqueuse), test de détection du seuil douloureux (même procédé jusqu’à obtenir une sensation douloureuse), test dynamique de l’allodynie mécanique (vibration d’une tête de coton-tige sur la muqueuse pendant 10 secondes et évaluation de la douleur). La mesure de la douleur a été relevée grâce à une échelle visuelle analogique. Comparé aux autres groupes, le groupe de patients atteints d’odontalgie atypique présente un seuil au tact et à la douleur abaissés et l’on note la présence d’allodynie mécanique, absente dans les autres groupes. Le meilleur test pour différencier une pulpite d’un patient sain est le test de détection du seuil douloureux. Entre le groupe contrôle et le groupe de patients atteints d’odontalgie atypique, les trois tests quantitatifs de l’étude permettent de discriminer la pathologie. Ces mêmes tests sont également efficaces pour établir un diagnostic différentiel entre la pulpite irréversible et l’allodynie mécanique. Ainsi, un seuil au tact > 1 g/mm2 et un seuil de la douleur > 10 g/mm2 peuvent être utilisés avec précision pour confirmer le diagnostic. L’allodynie mécanique peut être expliquée par des défauts génétiques et/ou la répétition d’altérations nerveuses qui vont conduire à des modifications anatomiques et physiologiques par la désorganisation synaptique, la distribution spatiale et la réarborescence des terminaisons nerveuses et de leurs champs récepteurs. Le stimulus initialement tactile sera alors interprété comme douloureux. Les modifications en cause sont périphériques et/ou centrales.
Dans notre exercice, ces tests peuvent être facilement pratiqués avant de référer le patient à un praticien spécialisé dans la prise en charge des douleurs neuropathiques. Il suffit de frotter légèrement la tête d’un coton-tige (test de l’allodynie mécanique) ou de piquer modérément grâce à une sonde d’exploration (test de détection du seuil douloureux) sur la zone controlatérale puis sur le site concerné pour la comparaison. Ces tests quantitatifs sont donc fiables mais ne doivent pas être interprétés sans être associés à l’historique médical, les examens cliniques et radiologiques indispensables à l’établissement du diagnostic.
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