Avant tout, n’oubliez pas que si un chirurgien-dentiste partait à la retraite avec 50 % de ses revenus il y a une vingtaine d’années, vous partirez avec à peine 25 % des vôtres si vous ne faites rien pour compléter les retraites des régimes obligatoires.
Entre 25 et 30 ans, la rage de vaincre et la jeunesse
C’est la période d’installation. Ce qui vous inquiète le plus, c’est de savoir si tout va bien se passer. Les patients vont-ils venir, et nombreux si possible ? Quels seront le chiffre d’affaires, les charges, les impôts ? Les revenus seront-ils suffisants pour avoir un bon niveau de vie ? Avec toutes ces sources d’inquiétudes, vous êtes loin, très loin, de penser à la retraite. Enfin, normalement… À moins que vous ne fassiez partie des 70 % de jeunes qui ne rêvent que de devenir fonctionnaires pour s’assurer un avenir « pépère ». Dans ce cas, vous faites fausse route, le métier de chirurgien-dentiste est loin d’être pépère, mais en contrepartie les revenus moyens sont 3 à 4 fois supérieurs aux revenus moyens des salariés du privé ou du public, et vous n’avez pas de hiérarchie…
Vous pouvez penser que la retraite c’est encore très loin ! Ce n’est que dans 35 à 40 ans… Et vous n’avez pas tout à fait tort. Avant de songer à la retraite, pensez d’abord à l’essentiel. Bien que vous soyez totalement invincible (!), assurez votre patrimoine le plus précieux, c’est-à-dire vous-même. A quoi cela servirait-il d’avoir pensé à tout pour la gestion du cabinet si le moindre arrêt de travail pouvait tout remettre en cause ? Dans votre tranche d’âge, l’impératif est de mettre en place un bon contrat de prévoyance. Mais une fois cela fait, préparez déjà votre retraite. Cela ne signifie pas que vous commencez déjà à penser à arrêter de travailler, cela veut dire que vous êtes conscient des problèmes à venir.
S’il y a un premier investissement à faire, il concerne l’achat de votre résidence principale, qui doit être le premier gros investissement de votre carrière. Cela vous évitera de payer entre 9 600 € et 12 000 € de loyer par an pour vous loger. Bien entendu, nous vous conseillons de ne pas acheter un château tout de suite. Faites en fonction des possibilités. Si, dans quelques années, vous pouvez acheter plus grand, plus beau, alors vous pourrez toujours revendre le premier bien pour financer une partie du second. Pour le reste, attendez encore un peu que votre activité soit bien stabilisée. Mais tant que vous n’avez pas acheté votre résidence principale, privilégiez les placements disponibles dans les plus brefs délais.
Vous pouvez aussi envisager d’acheter les murs de votre cabinet. Compte tenu du prix de l’immobilier actuellement, nous vous conseillons de bien comparer le coût réel du loyer par rapport au coût réel de l’achat. Il y a parfois des surprises !
Et si grâce à votre activité débordante vous gagnez déjà assez d’argent pour épargner après avoir payé les crédits d’installation professionnelle et de la résidence principale, vous avez bien travaillé.
Entre 30 et 35 ans, à fond la caisse
C’est une période de stabilisation. Votre chiffre d’affaires a augmenté et, en principe, vous commencez à voir la fin des crédits d’installation professionnelle. Votre potentiel est certainement intéressant et les enfants, si vous en avez, ne vous coûtent pas encore trop cher (cela viendra plus tard, alors profitez-en). Si vous n’en avez pas encore, un conseil, faites-en tout de suite, car ce n’est pas à l’âge de 60 ans que vous serez le plus apte à supporter la période adolescente, voire pré ou post-adolescente. Il paraît même que certains restent bloqués dans la phase post-ado… Ne vous inquiétez pas, avec les enfants, ce sont les cinquante premières années les plus difficiles.
Spécialement pour vous, Mesdames, après avoir fait une journée de quarante-huit heures, il ne vous reste sans doute plus beaucoup de temps pour songer à votre avenir. Pourtant, faites un break et pensez-y sérieusement, car ce n’est pas après avoir élevé tout ce petit monde qu’il faudra le faire, il sera certainement un peu tard. Il faut dès à présent penser à vous.
Alors qu’allez vous faire de tout cet argent que les Urssaf, la caisse de retraite et le fisc n’ont pas (encore) pris ? Vous aurez le choix entre l’immobilier locatif, les placements à caractère boursier, l’assurance vie, le Plan d’Épargne Entreprise (PEE), le Plan d’Épargne pour la Retraite Collectif (PERCO) et la loi Madelin. A 35 ans, avec un coût réel de 4 720 € par an, la loi Madelin vous permet d’obtenir une rente annuelle de 17 500 € à vos 67 ans. « Saperlipopette », il n’y a pas beaucoup de placements aussi rentables. Mais ne vous trompez pas de contrat !
Entre 35 et 40 ans, « ça plane pour moi »…
Vous êtes normalement à plein régime, et le fisc a sorti le gros aspirateur (votre tranche d’imposition flirte avec les sommets). Les enfants sont encore petits et ne coûtent pas encore cher. C’est le meilleur moment pour investir sérieusement pour la retraite.
Si vous n’avez pas encore acheté votre résidence principale ! Pensez-y, c’est encore le moment !
Vous pensez peut-être à acheter les murs de votre cabinet. Comme signalé plus haut, compte tenu du prix de l’immobilier actuellement, comparez bien le coût réel du loyer par rapport au coût réel de l’achat afin d’éviter les surprises. Sinon, c’est une excellente idée, ainsi vous liez l’utile à l’agréable.
Mais sous quelle forme acheter ? Société Civile Immobilière (SCI), bien professionnel ou simplement bien privé que vous louerez à la partie professionnelle ? Pensez, quoi qu’il arrive, simplicité et fin de carrière. Dans ce cas, l’achat en bien privé que vous louerez à votre partie professionnelle est la solution la plus évidente.
Entre 40 et 45 ans, vous êtes le roi… mais pas Carotte
Pierre Corneille écrivait qu’« un véritable roi n’est ni mari ni père ». Sans doute ne s’est-il pas fait que des amies. Pour la paix de votre ménage, Monsieur, ne le répétez pas à Madame.
Vous avez eu des enfants et vous commencez à savoir ce que sont les pré-ados ou ados (on vous en avait parlé, mais vous pensiez que les vôtres seraient différents, eh bien non !). Le poids des crédits est moins lourd ; certains sont même terminés.
Qu’allez-vous faire pour votre retraite, tout en payant les loisirs et les études qui courent derrière ces chers petits ? Dur, dur ! Pourtant, d’autres y arrivent, et c’est vraiment le moment d’investir. Après, ce sera nettement plus cher. Ne tardez plus à préparer votre retraite. En forçant un peu, vous pouvez encore envisager un départ à 62 ans, mais c’est tout juste.
Pensez à votre conjoint : s’il ou elle n’a pas ou peu de revenus d’activité, souscrivez un contrat retraite en loi Madelin avec une garantie de prise en charge par la compagnie en cas de décès de votre part. Ajoutez aussi à cela un bon plan de prévoyance. Ainsi, vous lui assurerez un avenir plus serein avec des revenus garantis.
Quitte à pleurer votre irremplaçable et insoutenable absence, autant que vos proches le fassent avec des mouchoirs à vos initiales et dont les bordures seront brodées au fil d’or, vous le méritez bien.
Mais si vous êtes vraiment fâchés, vous pouvez aussi souscrire des produits sans réversion. Dans ce cas, il est moins évident que l’on vous pleure.
A 40 ans, avec un coût réel de 7 000 € par an, la loi Madelin vous permet d’obtenir une rente annuelle de 17 500 € à vos 67 ans. Diantre ! Ce n’est pas mal du tout. Mais ne vous trompez pas de contrat !
Que choisir ?
L’immobilier locatif défiscalisé.
Évitez dans l’immédiat les opérations « extraordinaires » proposées par les professionnels de la branche. L’avantage fiscal est totalement englouti par l’exubérance des prix au mètre carré pratiqués actuellement. Si vous entendez le chant des sirènes, mettez des bouchons dans les oreilles, cela vous coûtera moins cher. En revanche, il est évident que si vous trouvez un bien immobilier dont le prix vous semble correct, sans vices cachés, il serait certainement dommage de passer à côté. Si en plus il y a quelques travaux à faire, ils pourront être défiscalisés par le biais de la loi dite Balladur, loi du déficit foncier. C’est de loin la solution la plus rentable en immobilier.
Les placements à caractère boursier.
Compte tenu de l’évolution actuelle de l’économie et donc des marchés, à moins que vous n’aimiez vous faire peur, tant que vous n’avez pas d’épargne conséquente sécurisée, nous vous déconseillons d’investir dans ces types de produits. Si vraiment vous y tenez, n’investissez pas plus de 50 % de vos possibilités d’épargne si vous êtes célibataire et pas plus de 25 % si vous avez des enfants. Sauf bien sûr si vous avez les compétences en la matière et/ou si vous avez la fameuse boule de cristal de Madame Irma.
Si, comme la grande majorité, vous ne vous y connaissez pas plus que ça, nous vous conseillons le Plan d’Épargne en Action (PEA), le PEE ou encore les placements à fiscalité assurance vie multisupports.
Le PEE et le PERCO.
Il s’agit actuellement de placements attractifs, car, une fois n’est pas coutume, nous pouvons avoir le beurre et une partie de l’argent du beurre…
Une partie de l’investissement est défiscalisée (au maximum les trois quarts de l’investissement plafonnés à 2 662 € par an) et, au terme de 5 années, les plus-values ne sont pas imposables ; elles subissent quand même les 15,5 % de CSG-CRDS. La période de 5 années est à prendre pour chaque versement individualisé et non à compter de la date d’ouverture du plan.
Si vous sortez tout ou partie de l’épargne constituée avant les 5 ans, vous serez imposé sur les plus-values, sauf conditions spécifiques permettant un déblocage anticipé (mariage, naissance, divorce, invalidité d’au moins 80 % de vous-même, votre conjoint ou votre enfant, décès, arrêt d’activité, acquisition ou agrandissement de la résidence principale, surendettement).
Les capitaux constitués entrent dans le cadre du calcul de l’impôt sur la fortune (ISF).
Il convient de regarder les frais de très près. Comme pour l’immobilier défiscalisable, ce n’est pas parce que vous défiscalisez que les gestionnaires banquiers et/ou assureurs doivent en profiter pour se gaver sur votre dos. Attention, ce n’est pas le livret A : les sommes sont placées sur des Fonds Communs de Placement d’Entreprise (FCPE) ou des Sociétés d’Investissement à Capital Variable (SICAV), donc soumis aux aléas boursiers, même s’il s’agit de SICAV obligataires. Question sécurité, il y a mieux.
Il ne faut pas oublier que plus votre ou vos employés investiront, plus vous serez obligé d’abonder pour eux et moins votre propre PEE sera rentable.
Dernier point : si vous n’avez pas de salarié, vous n’avez droit ni au PEE ni au PERCO. Vous pouvez éventuellement embaucher votre conjoint pour quelques heures, mais vérifiez bien que les conséquences sur les minima des cotisations sociales et retraites obligatoires n’absorbent pas totalement l’économie d’impôts du PEE-PERCO, ce qui pourrait aboutir à une opération nulle, voire négative. Décidément rien n’est idyllique.
Les placements à fiscalité assurance vie.
Pour les multisupports, reportez-vous au paragraphe sur les placements à caractère boursier.
Quel que soit votre âge, préférez les supports sécurisés pour au moins 70 % de votre épargne. Même si l’on vous dit que c’est « ringard ». Demandez aux plus anciens ce qui leur est déjà arrivé, notamment depuis 1999. Peut-être pensez-vous qu’ils sont moins éclairés que vous, mais n’oubliez pas que si l’être humain a évolué, c’est parce que l’homme a eu l’intelligence de se servir des connaissances acquises par les générations antérieures…
La loi Madelin.
Si vous avez 60 000 € de bénéfice (BNC), vous pouvez défiscaliser en totalité jusqu’à 9 115 €. Si vous avez 100 000 € de bénéfice (BNC), vous pouvez défiscaliser jusqu’à 19 115 €. Si vous avez 150 000 € de bénéfice (BNC), vous pouvez défiscaliser jusqu’à 31 615 €. Et ainsi jusqu’à un maximum de 72 571 € pour l’année 2017. C’est mieux que le PEE-PERCO.
Si vous êtes dans la tranche d’imposition supérieure à 30 % ou 41 %, voire 45 %, vous avez intérêt à investir une partie de votre épargne dans la loi Madelin, car ce sont les impôts qui payent votre retraite à hauteur de 30 à 45 %.
Vous pouvez faire varier votre épargne tous les ans entre environ 1 200 € jusqu’au maximum de déduction possible, en fonction de la tranche choisie et de votre BNC ou revenus de gérance si vous êtes en Société d’Exercice Libéral (SEL). Vous avez donc une excellente souplesse d’investissement année par année.
Les capitaux constitués ne sont soumis ni à l’impôt sur les plus-values ni à la CSG-CRDS.
Ils ne sont pas soumis à l’ISF pendant la constitution de l’épargne.
Vous évitez l’ISF pendant le service de la rente si vous investissez pendant au moins 15 années.
En prenant un bon produit, en cas d’arrêt de travail ou d’invalidité, la compagnie prend en charge la totalité de votre investissement ; ainsi, votre retraite se constitue gratuitement. En cas de décès, la compagnie prend également en charge votre épargne jusqu’au moment où vous auriez eu 65 ans ; ainsi votre conjoint est sûr de percevoir 100 % de la rente au comment où il en aura le plus besoin.
Et enfin, avec la loi Madelin, si vous n’êtes plus content du produit ou de la gestion, vous avez le droit de transférer l’épargne constituée vers un autre organisme et un autre contrat de même fiscalité. Le capital n’est pas disponible, mais cela est assez largement compensé par les avantages indiqués ci-dessus. Mais il est bien entendu évident qu’il ne faut pas investir toute son épargne sur un seul et même type de placement.
Et attention aux contrats actuellement proposés sur le marché. Beaucoup demandent d’investir sans regarder et indiquent qu’au terme la rente sera calculée en fonction des paramètres en vigueur à ce moment-là. Dans ce cas, ce sera au bon vouloir de la mutuelle, de la compagnie ou de la banque. Aucun chiffre n’étant indiqué contractuellement à l’avance, vous découvrirez le jour venu le montant de votre rente.
Il y existe aussi une nouvelle génération de contrats qui indiquent que tout est garanti et qui, dans un ou plusieurs articles des conditions générales, précisent que les droits de l’adhérent peuvent être modifiés à tout moment ! Donc, rien n’est garanti. Et vous continuez d’investir sans le savoir.
Mais il existe aussi de très bons contrats. Nous développerons cette partie dans notre dernier article à paraître, avec les pièges à éviter.
Conclusion
Commencez à épargner le plus tôt possible pour préparer votre retraite.
Pour la constitution d’un capital, et en attendant que vous trouviez un bien immobilier raisonnable, privilégiez un produit à fiscalité assurance vie en favorisant les supports garantis.
Pour une vraie rente de retraite, préférez la loi Madelin qui vous permet une très forte défiscalisation. Si vous le pouvez, commencez assez tôt la loi Madelin. Par exemple, à l’âge de 40 ans, après déduction fiscale, avec un coût réel de 7 000 € par an, vous aurez, avec les meilleurs contrats, une rente annuelle d’environ 17 500 € à l’âge de 67 ans. Et à l’âge de 35 ans, il suffit d’un coût réel de 4 720 € par an pour obtenir les mêmes 17 500 € à 67 ans. Peu de produits apportent un tel rendement. Plus vous débutez tôt, moins l’investissement annuel sera important.
Le fait d’investir tôt peut vous permettre aussi de partir à la retraite dès l’âge de 62 ans.
Quitte à être traité de nanti par les âmes bien pensantes, autant l’être jusqu’au bout…
A très bientôt pour un prochain article consacré aux praticiens de 45 à 67 ans.
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