Types de brosses à dents et lésions cervicales

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire n°23 - 12 juin 2019
Information dentaire
Article analyséTurssi CP, Kelly AB, Hara AT. Toothbrush bristle configuration and brushing load : effect on the development of simulated non-carious cervical lesions. J Dent 2019 May 23 [Epub ahead of print]

Les lésions cervicales non carieuses sont définies comme une perte de substance à la jonction amélo-cémentaire sans phénomène carieux associé. L’origine et les mécanismes qui y conduisent ne sont pas complètement établis. Plusieurs facteurs, parmi lesquels des phénomènes d’abrasion, d’érosion et de fatigue, sont probablement impliqués. Souvent incriminé, l’effet abrasif du brossage dentaire est reconnu par plusieurs études qui le considèrent toutefois plutôt comme un facteur qui contribue à leur développement. Quels conseils relatifs au brossage pouvons-nous alors donner à nos patients pour prévenir ou limiter le développement de ces lésions ?

Les auteurs de cette étude se sont intéressés à l’influence du type de brosse à dents employé, et plus particulièrement à la configuration des brins. Les formes les plus classiques présentent des brins aux extrémités arrondies et de même longueur, conduisant à une surface de brosse plate. Mais de très nombreuses autres formes de brins, ainsi que divers modes d’agencement de ces derniers, sont apparus sur le marché avec, d’une part, des surfaces de brosse en vagues, à différents niveaux ou angulées et, d’autre part, des brins aux extrémités arrondies, coniques ou encore des brins plumés (chaque brin se subdivise à son extrémité en plusieurs filaments).

Les auteurs ont ainsi mis au point une étude expérimentale réalisée sur 160 prémolaires maxillaires extraites indemnes de caries, de taches, de défaut amélaire ou radiculaire et de restauration. Leur surface radiculaire a été couverte d’une résine acrylique pour simuler le contour gingival situé 2 mm apicalement à la jonction amélo-cémentaire. À l’aide d’un dispositif expérimental spécifiquement réalisé, les effets de cinq types de brosse ont été évalués sur la zone amélo-cémentaire avec un dentifrice moyennement abrasif mélangé à un tiers d’eau distillée et à deux niveaux de pression (1 et 3 Newtons). Ces forces appliquées ont été choisies sur la base de connaissances antérieures arguant que 70 % des sujets appliquent une force moyenne comprise entre 1,6 et 2,8 N, et 2,9 N pour la plupart des sujets présentant des lésions cervicales. 55 000 allers-retours horizontaux ont été appliqués sur les dents afin de simuler dix ans de brossage. Ce type de mouvement a été retenu en considérant que durant le brossage, 60 % des mouvements sont horizontaux. Les 5 brosses souples incluses dans l’étude sont : une brosse ordinaire à surface plane, une brosse à surface ondulée, une à brins croisés multiniveaux avec éléments en caoutchouc intégrés, une à brins croisés multiniveaux et tête flexible et une à brins plumés.

À l’issue de ce protocole expérimental, l’analyse du volume des pertes de substance dentinaires observées et des formes de lésions a montré que les brosses à dents de type ordinaire à surface plane provoquaient le plus de perte de substance comparées aux autres modèles, tous équivalents sur cet aspect. L’hypothèse, non vérifiée, que les auteurs proposent en discussion est que ces brosses présentent généralement des brins plus gros que les autres brosses, ce qui permettrait l’application d’une plus grande quantité de dentifrice et de ses abrasifs sur la zone brossée. Du point de vue de la forme des lésions, la brosse avec inserts en caoutchouc et celle à surface vaguelée ont donné lieu aux lésions de forme angulaire les plus aiguës, tandis que la brosse à brins plumés a conduit à des pertes de substances de forme beaucoup plus arrondies. Toutefois, la plupart des lésions provoquées par ce protocole étaient de formes plutôt arrondies, ce qui correspond aux observations cliniques les plus fréquentes pour ce type de lésions non carieuses. Cependant, les auteurs rapportent qu’une précédente étude a noté une prévalence clinique de lésions anguleuses sur les prémolaires plus élevée que dans ce protocole, ce qu’ils attribuent à une probable cause occlusale. Sur l’aspect des brosses testées, ils concluent que les brosses de type classique conduisent à un volume de perte de substance significativement plus élevé, tandis que les lésions causées par les brosses à brins plumés sont moins anguleuses qu’avec les autres brosses.

Recommandations

L’étude expérimentale présentée nous engage donc à recommander préférentiellement à nos patients l’usage de brosses à dents souples à brins plumés, afin de limiter la perte de substance autour de la jonction amélo-cémentaire et la formation de lésions anguleuses. Toutefois, la forme de la brosse est loin d’être le seul facteur en jeu dans les lésions cervicales. Le rôle occlusal semble aussi être un facteur étiologique important de ces lésions par la flexion des cuspides provoquant l’éclatement des cristaux d’émail au collet. À cela s’ajoutent les effets potentiellement abrasifs ou érosifs de certains aliments, boissons acides, voire des reflux et des multiples facteurs liés au brossage. Le protocole expérimental appliqué dans l’étude repose sur un brossage horizontal continu de 55 000 cycles avec un dentifrice standard. En réalité, le brossage ne dure que quelques minutes par jour entre des périodes où les dents concernées peuvent connaître des épisodes de reminéralisation ou d’autres agressions. Par ailleurs, si les auteurs font le constat du brossage horizontal fréquemment appliqué par les patients, la technique du brossage en rouleau par des mouvements rotatifs de la gencive vers la dent est celle qui est recommandée tant pour des raisons d’efficacité que de préservation des tissus. Ainsi, dans sa démarche de prévention clinique relative aux lésions cervicales, le chirurgien-dentiste doit prendre en compte l’ensemble des paramètres en jeu en vérifiant ou en ajustant d’abord la qualité du schéma occlusal, en décourageant l’emploi des dentifrices dits « blancheur » fortement chargés en abrasifs, en recommandant l’usage d’une technique de brossage efficace et atraumatique et donc également l’emploi d’une brosse souple à brins plumés

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