Pierre Le Coq quitte rarement sa Bretagne, sa mer, et encore moins sa planche. Mais ce jour-là, Monsieur le Secrétaire d’État aux Sports, Thierry Braillard, souhaite encourager les membres de l’Équipe de France de voile olympique. « Banque Populaire », le partenaire historique de la Fédération française de voile, a convié tout le monde sur une petite scène, dans le 13e arrondissement de Paris. Ils sont jeunes, halés. Ils font du Laser, du Finn, du 49er, du Nacra 17… Ils sont une quinzaine et, chacun leur tour, ils expliquent ce qu’ils attendent de Rio.
Assis au premier rang, Pierre Le Coq parle de « rêve de gosse qui se réalise », et de « compétition très relevée ». Puis le voilà qui serre des mains, claque des bises et enchaîne les mercis. « Faites-nous rêver ! », lui lance une dame qu’il ne semble pas reconnaître.
Peu importe, le jeune homme a compris qu’il sera très attendu au mois d’août. Il ne s’en cache pas d’ailleurs : sur sa planche à voile, il vise le podium. Et il a clairement raison d’y croire, au vu de ce qu’il a démontré ces derniers mois : une médaille de bronze au Test Event de Rio l’été dernier, puis un titre de champion du monde en RS:X (le type de planche utilisée à Rio) en Oman en octobre.
« Gaffe aux conneries »
Le jeune Breton a aussi l’avantage de bien connaître le plan d’eau sur lequel il naviguera pendant les Jeux. « Je l’ai déjà testé, et il me correspond parfaitement. C’est comme si, au tennis, on vous demandait de jouer d’abord sur du dur, puis d’enchaîner sur l’herbe, et de terminer sur terre battue. C’est très changeant. Et ça, j’adore. » Parmi ses concurrents directs, il sera le seul à découvrir les jeux Olympiques. Les autres y ont presque tous déjà décroché une médaille. Le risque, c’est justement qu’il se laisse impressionner. C’est ce que lui répètent sans cesse deux « anciens » de la voile française, Julien Bontemps (médaille d’argent à Pékin en 2008) et Faustine Merret (médaille d’or à Athènes en 2004). « Ils me disent qu’il ne faut pas que je surjoue, mais plutôt que je navigue à mon niveau. Ils me disent aussi de rester concentré jusqu’au bout, de faire vraiment gaffe aux conneries de débutant qui peuvent me coûter une médaille. » Pierre Le Coq écoute attentivement ses aînés : il les a longtemps admirés quand il était gamin. « J’ai suivi leurs performances aux JO, sur l’ordinateur de la famille, j’étais scotché sur l’écran. » Cette fois, c’est lui qui a l’occasion d’inscrire son nom dans l’histoire de la planche à voile.
Maman aux jumelles
Si Pierre Le Coq s’est mis à la planche à voile, c’est parce qu’il a grandi dans une famille de mordus. Son père a par exemple été plusieurs fois champion de France dans les années 80. C’est à 9 ans que Pierre tire ses premiers bords, dans la baie de Saint-Brieuc. « J’étais haut comme trois pommes, je revois ma maman avec ses jumelles, elle passait ses après-midi à me surveiller. » Les Le Coq habitaient à côté de la mer et de l’école de voile.
Pierre a bien essayé d’autres sports, mais il n’a rien trouvé de mieux que la planche. « C’est un mélange de plein de sensations, liberté, adrénaline, équilibre, vitesse. Je pourrais vous en parler pendant des heures. » En parlant de vitesse, il raconte qu’un jour il a atteint les 65 km/h en mer, son record personnel. « C’est déjà beaucoup, mais certains vont à 100 km/h. Ces mecs-là sont des fêlés ! » Tout est allé très vite pour lui aussi. À 10 ans, il participe à sa première compétition. À 13 ans, il devient vice-champion de France. À 17 ans, il est sacré champion du monde junior.
Dentiste, une affaire de famille
Ses parents ne se sont pas contentés de lui transmettre le virus de la mer.
Il a également hérité de leur passion pour la fraise et le détartrage. « Gamin, je répétais à tout le monde que je serais dentiste, comme papa et maman. Le soir au dîner, on parlait tout le temps de leurs rendez-vous, ça m’a marqué. Donc, naturellement, j’ai voulu aussi soigner les dents ! » Monsieur et Madame Le Coq exercent à Saint-Brieuc. Lui est encore inscrit à la faculté dentaire de Brest, où il a validé sa sixième année. Sa thèse sera consacrée aux liens entre l’hygiène dentaire des sportifs et la performance. L’université est située à une dizaine de minutes en voiture de son pôle d’entraînement. Pratique, donc, pour celui qui jouait sur les deux tableaux il y a encore quelque temps. Car pour préparer « à 200 % » les jeux Olympiques, Pierre Le Coq a choisi de mettre entre parenthèses ses études, « histoire de ne pas avoir de regrets ». Au pire, si vraiment les cours lui manquent, il peut toujours jeter un œil dans les classeurs de ses deux sœurs… elles aussi inscrites à la faculté dentaire à Brest.
« Le dentiste de service »
Reste que Pierre Le Coq continue d’être « le dentiste de service pour tout le monde ». Un nombre incalculable de sportifs viennent le voir pendant les compétitions pour lui demander un conseil. « On me dit : tiens, j’ai mal ici, ça me lance là, c’est grave, pas grave ? » Pour qu’on le laisse tranquille, il rappelle qu’il n’a pas exercé depuis quelque temps… Ses parents aussi vont faire une pause cet été, au mois d’août. Ils vont laisser leur cabinet et s’envoler pour Rio, histoire d’encourager le fiston. Il aura aussi besoin d’eux, plus tard, quand il sera l’heure de s’installer. Il se voit travailler deux ou trois jours par semaine. Le reste du temps, il le passera sur l’eau. Il y aura d’ailleurs un écriteau sur la porte du cabinet : « Fermé au-dessus de 15
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