« Les antibiotiques, c’est pas automatique ! » Le slogan du premier plan d’actions contre la surconsommation d’antibiotiques (2001-2005) avait permis d’enregistrer une baisse significative de la consommation d’antibiotiques de 33,4 doses définies journalières (DDJ) en 2000 à 27,1 DDJ en 2004, soit près de 19 % de baisse. Mais depuis, plus rien. « Les deux plans qui lui ont succédé, pour la période 2005-2010 puis 2011-2016, fondés sur la pédagogie et l’autorégulation des professionnels, se sont soldés par des échecs », constate la Cour des Comptes dans un document mis en ligne le 14 février. La consommation en ville a progressé de 3 % entre 2005 et 2015, revenant à 30,3 DDJ en 2016, ce qui place la France parmi les trois pays les plus consommateurs d’antibiotiques en Europe. Notre consommation est trois fois supérieure à celle des Pays-Bas, qui sont les moins consommateurs, « sans qu’aucune raison épidémiologique ne vienne expliquer cet écart », ajoute la Cour. Elle est le double de celle de l’Allemagne et reste supérieure d’un tiers à celle du Royaume-Uni. « Outre l’enjeu de sécurité sanitaire, il faut relever que l’assurance maladie pourrait économiser 400 millions d’euros environ si la consommation française était la même que celle des Pays-Bas. »
Pourquoi de si mauvais résultats ? Les sages de la rue Cambon pointent des recours excessifs aux prescriptions d’antibiotiques sans justifications (le test rapide de dépistage de l’angine virale n’est utilisé que par 40 % des médecins), de mauvais choix de molécules, des durées de prescription trop longues malgré les recommandations de la HAS (22 % des prescriptions sont comprises entre 8 et 10 jours) et un mode de dispensation à la boîte inadapté. Selon les expérimentations réalisées, la délivrance à l’unité permet d’économiser 10 % de la consommation totale tout en limitant l’automédication, particulièrement contre-indiquée avec cette classe de médicaments. « Il n’y a pas de fatalité, estime la Cour. Une action déterminée devrait permettre d’inverser rapidement cette tendance défavorable et de rejoindre rapidement un niveau de consommation comparable aux meilleures performances européennes. » Pour y parvenir, la Cour des Comptes propose de généraliser le recours au logiciel d’aide à la prescription, de favoriser la dispensation à l’unité des antibiotiques, de croiser les prescriptions des médecins généralistes par les médecins coordonnateurs des EHPAD ou encore de rendre obligatoire la formation continue des médecins en la matière. Selon l’Agence du médicament, sur la base du nombre de boîtes d’antibiotiques vendues en ville en 2016, 69,1 % avaient été prescrites par des médecins généralistes, 12,5 % par des médecins hospitaliers (mais délivrées en ville), 9,5 % par des chirurgiens-dentistes, et plus marginalement par d’autres spécialités médicales (ORL, dermato…).
Commentaires