Afin d’améliorer le suivi de patients atteints d’une maladie hépatique cholestatique, une méthode non invasive en temps réel pour apprécier les dépôts de bilirubine et la progression de la maladie serait d’une grande aide. Ces patients sont habituellement soumis à des prélèvements sanguins multiples par ponction veineuse pour suivre la progression de leur maladie.
DIAGNOdent est, à l’origine, un dispositif d’aide au diagnostic de la présence de caries basé sur la détection de la porphyrine issue du métabolisme bactérien, en utilisant la fluorescence laser. Cet équipement émet un rayon laser à une longueur d’onde de 655 nm qui interagit avec la porphyrine, et la fluorescence provenant de cette interaction est mesurée quantitativement. Plus la concentration de porphyrine est élevée, plus les valeurs de fluorescence obtenues sont élevées. Or, il existe aussi une interaction entre cette émission laser et la bile, qui est également mesurable quantitativement.
Cette étude a été conçue pour vérifier si le tissu dentaire serait perméable à la bilirubine, dans une situation expérimentale dans laquelle on observerait une augmentation progressive de bilirubine sérique, et de vérifier la validité de l’utilisation du DIAGNOdent pour le suivi.
Après avoir confirmé la capacité de DIAGNOdent à mesurer des concentrations biliaires variables in vitro, un modèle animal de maladie hépatique cholestatique a été mis au point pour détecter une augmentation de l’imprégnation de la bilirubine dans les dents de rats. Trois groupes de rats Wistar ont été étudiés : groupe 1, rats soumis à une ligature des canaux biliaires après laparotomie ; groupe 2, rats naïfs sans procédure ; groupe 3, rats soumis à une laparotomie sans ligature des canaux biliaires. Les dents des rats des trois groupes ont été analysées à l’aide de DIAGNOdent avant la procédure et à J 10 et J 50 après la chirurgie. La bilirubine sérique a également été mesurée.
Les tests in vitro ont confirmé que DIAGNOdent détectait la bile en fonction de sa concentration. Le modèle de ligature a bien entraîné un dysfonctionnement hépatique progressif, la mort survenant environ 50 jours plus tard. Les valeurs de DIAGNOdent obtenues sur les dents ont montré une corrélation avec la progression de l’hyperbilirubinémie sérique.
Commentaire
Examiner la dent pour surveiller une maladie systémique serait un concept nouveau et intéressant dans la pratique clinique, les dents étant facilement accessibles et « analysables optiquement ». Certaines études ont déjà montré que la modification de l’aspect des dents pouvait être un indicateur clinique de l’évolution péjorative de certaines maladies hépatiques, comme l’apparition de taches verdâtres. La rareté des études sur ce sujet a probablement résulté de limites technologiques du matériel de diagnostic. Les progrès actuels en odontologie incorporent de plus en plus de nouvelles technologies, notamment dans le domaine de l’analyse optique.
Les résultats de cette étude sont encourageants, le tissu dentaire s’étant révélé un bon tissu pour surveiller de manière non invasive la progression de la bilirubinémie dans ce modèle de maladie hépatique cholestatique. Le passage à une application chez l’homme est encore lointain, mais ce type d’étude ne fait que renforcer la transformation des chirurgiens-dentistes en médecins de la bouche.
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