Une panne d’électricité en pleine chirurgie ? Impensable. C’est pourtant ce qui pourrait advenir cet hiver si des délestages (coupures temporaires) étaient décidés par EDF pour conserver l’intégrité du système électrique face au manque de production ou d’approvisionnement.
Car les cabinets dentaires tout comme les cabinets médicaux d’ailleurs, ne se trouvent pas dans la liste des services qui peuvent bénéficier de la continuité d’alimentation électrique fixée par un arrêté du 5 octobre 1990. Seuls les hôpitaux, cliniques et laboratoires sont concernés car ils « ne sauraient souffrir d’interruption dans leur fonctionnement sans mettre en danger des vies humaines », tout comme « les établissements dont la cessation ou la réduction brutale d’activité comporterait des dangers graves pour les personnes », indique l’arrêté.
S’appuyant sur ce dernier, l’ARS PACA a prévenu le 6 octobre les différentes URPS de la région : « malgré l’importance de votre activité, les cabinets ne peuvent pas figurer sur la liste prioritaire et doivent se préparer » à des délestages « qui n’excèderont pas deux heures par tranche de 24h ». L’arrêt soudain de l’électricité au cours d’une chirurgie ou de la pose d’implants, ne comporterait donc pas de dangers graves ?
« Cette position est incompréhensible, se désole Gérard Tolila président de l’URPS des chirurgiens-dentistes. Pour soigner nos patients, nous avons un besoin constant d’électricité. Au fond, ils ne comprennent pas ce qu’est notre métier et ne nous prennent pas pour des professionnels de santé. Comme d’habitude, hélas ». Contactée par nos soins, cette dernière n’a pas répondu. En revanche, l’ARS d’Occitanie a elle répondu à Alain Durand, président du conseil régional de l’Ordre régional des chirurgiens-dentistes qui s’inquiétait de la situation.
Pas d’électricité pas de garde
Selon elle, il n’est pas possible d’exclure les cabinets dentaires ou médicaux d’éventuelles coupures de courant car il est impossible de les différencier des résidents environnants. « Faux, répond Alain Durand. Avec les compteurs Linky connectés, ils pourraient parfaitement localiser les professionnels de santé et donc cibler les délestages, ce que m’a confirmé un spécialiste d’EDF. C’est évidemment un long travail de référencement qu’ils n’ont tout simplement pas envie de faire. Le directeur de l’ARS m’a assuré qu’il mettrait tout en œuvre pour que cette situation n’arrive pas. Très bien, mais je l’ai prévenu qu’à la moindre coupure nous n’assurerions plus les gardes. Car pour rattraper le temps médical perdu nous serons contraints de travailler le dimanche pour nos patients et non plus pour les urgences ».
Pour faire face aux délestages, l’ARS PACA propose aux praticiens « d’installer un groupe électrogène, un ou des onduleur(s) pour la préservation des systèmes informatiques » ou encore « de décaler les interventions qui auraient été programmées sur des tranches horaires délestées ».
La FSDL a réagi faisant savoir qu’elle ne laisserait pas « des milliers de cabinets dentaires privés aléatoirement d’électricité ». « Il est inimaginable d’envisager une seule seconde qu’un soin sur un patient soit interrompu quand on connaît les impératifs de notre métier lors d’interventions délicates qui ne peuvent être réalisées sans une instrumentation mécanisée, argue le syndicat (…) Toutes les mesures nécessaires seront étudiées et appliquées si aucune modification de priorisation d’accès à l’alimentation électrique des cabinets dentaires n’est apportée ».
Le 7 septembre dernier, les Libéraux de Santé, intersyndicale qui regroupe onze organisations de dix professions, dont Les CDF, avait appelé le gouvernement « à exclure les lieux d’exercice des professionnels (cabinets, officines et laboratoires) des éventuels rationnements » pour « assurer la continuité des soins pendant la période hivernale ». Sans écho donc jusque-là.
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