Ainsi en a décidé le Conseil Constitutionnel le 21 janvier. « En se bornant à édicter une obligation relative aux modalités de paiement de la part des dépenses prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire sans assortir cette obligation des garanties assurant la protection des droits et obligations respectifs du professionnel de santé et de l’organisme d’assurance maladie complémentaire, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence », écrivent notamment les sages de la rue Montpensier. En clair, si la loi prévoit expressément comment l’Assurance maladie est contrainte de régler les professionnels de santé qui ont fait l’avance de frais en sept jours maximum avec des pénalités de retard au besoin et un suivi des paiements, elle ne dit rien au sujet des complémentaires santé.
À première vue, c’est une victoire pour les parlementaires de l’opposition qui avaient formulé ce recours, mais aussi pour les syndicats de professionnels de santé, dont tous les syndicats dentaires, vent debout contre cette mesure depuis bientôt deux ans.
Chacun d’eux avait d’ailleurs envoyé mi-janvier au Conseil Constitutionnel un argumentaire recensant les difficultés de mise en œuvre de cette loi pour le dentaire (lire ID n° 4). « Notre profession aurait été la plus touchée si le tiers payant avait dû s’appliquer sur la part complémentaire, estime ainsi Philippe Denoyelle, président de l’UJCD. Sans cette invalidation, notre profession aurait été plongée dans un imbroglio légal, technique et réglementaire aux conséquences financières impossibles à évaluer. » La CNSD et la FSDL sont à l’unisson, se félicitant de ce résultat.
La victoire n’est-elle pas en trompe l’œil ?
Si Marisol Touraine, la ministre de la Santé, a finalement affirmé à l’AFP dès le 22 janvier qu’elle ne légiférera plus sur le sujet, « prenant acte » de la décision du Conseil Constitutionnel, elle a bien précisé que les sages n’avaient « pas dit qu’il n’y aurait pas de tiers payant » et qu’il n’y avait « pas de remise en cause de ce dispositif ». « Ma conviction première, a-t-elle ajouté, est que les médecins se diront qu’il sera plus simple de pratiquer le tiers payant global pour l’ensemble de la consultation », que cela « facilitera » leur comptabilité. Et dans son communiqué de presse, elle enfonce le clou : « Au 30 novembre 2017, le tiers payant devient un droit pour tous les Français, pour la partie remboursée par la Sécurité sociale. Les professionnels de santé pourront en plus proposer le tiers payant pour la partie remboursée par les complémentaires santé. Celles-ci auront l’obligation de le proposer aux assurés dans le cadre des contrats responsables (plus de 90 % des contrats). » Déjà, la Mutualité Française s’est dite déterminée à poursuivre les travaux en cours avec les autres complémentaires santé, en lien avec l’assurance maladie obligatoire, pour être en mesure de proposer le tiers payant sur la part complémentaire d’ici à 2017. « C’est un service plébiscité par les Français, selon son président Etienne Caniard.
Les complémentaires et leurs partenaires travailleront avec les médecins qui le souhaitent afin d’éviter que les patients ne pâtissent de cette décision. » La responsabilité d’appliquer ou non le tiers payant incluant la part complémentaire incombera donc aux professionnels de santé. Si ce scénario advient, qui pourra longtemps ne pas le proposer alors que les consœurs et confrères alentour le pratiquent ?
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