La période d’essai d’un contrat de travail à durée indéterminée

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire (page 62-64)
Information dentaire
La période d’essai, qui permet à l’employeur d’évaluer les compétences de son salarié et au salarié d’apprécier ses nouvelles fonctions, est soumise à des règles précises à connaître impérativement sous peine de conséquences graves pour les deux parties.

La conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) entraîne des conséquences contraignantes pour l’employeur, car ce contrat est très protecteur pour le salarié. Ainsi, il ne peut pas être mis fin au CDI par une simple lettre recommandée ouvrant le délai de préavis comme pour les contrats de collaboration libérale entre chirurgiens-dentistes ; il faut respecter les règles de forme (entretien préalable) et de fond du licenciement, c’est-à-dire disposer pour l’employeur d’un motif réel et sérieux de licenciement (fondé soit sur la personne du salarié – sa faute, par exemple –, soit sur des causes extérieures de nature économique – une chute importante du chiffre d’affaires, entre autres).
D’où l’intérêt de prévoir une période d’essai qui, comme le précise le Code du travail (article L 1221-20), a une double fonction :
– pour l’employeur, c’est une période pendant laquelle il va évaluer les compétences de son salarié ;
– pour le salarié, c’est une période pendant laquelle il va apprécier si ses nouvelles fonctions lui conviennent.

Il faut différencier cette période d’essai du simple « test professionnel » qui n’est pas un essai en ce sens qu’il intervient avant toute signature de contrat ; ce test doit être très limité dans le temps (quelques heures) et n’est adapté qu’à des métiers où l’on peut apprécier rapidement la qualification du candidat. Celui-ci, bien que placé dans des conditions de travail, n’effectue aucune prestation rémunérée (ainsi en est-il selon la jurisprudence d’un test de conduite fait en présence du chauffeur habituel du car et dans un car vide de passagers [arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 4 janvier 2000, n° 97-41154]).

La durée
C’est la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 « portant modernisation du marché du travail » qui a fixé pour la première fois une période d’essai légale (auparavant, la durée des périodes d’essai était fixée selon les conventions collectives, les accords collectifs, les accords d’entreprise ou les usages).
La durée de la période d’essai dépend du statut du salarié et peut être renouvelée une fois, mais uniquement si un accord de branche étendu le prévoit (article L. 1221-21 du Code du travail). C’est bien le cas pour les employés d’un cabinet dentaire (assistant(e) dentaire, aide dentaire, etc.) selon l’article 3.4 du titre III de la convention collective du personnel des cabinets dentaires qui précise : « La mention d’une période d’essai doit être stipulée par écrit dans le contrat de travail ou la lettre d’engagement ainsi que la possibilité de son renouvellement. Le contrat de travail débute par une période d’essai de 2 mois. Cette période peut être renouvelée pour la même durée, une fois. Le renouvellement, à la demande de l’employeur, doit être fait par écrit par lettre recommandée avec avis de réception, ou remise en mains propres contre décharge, avant la fin du second mois d’essai. »

Embauche d’un stagiaire à l’issue du stage
Cette situation constitue un cas particulier (article L. 1221-24 du Code du travail).
Si une entreprise embauche un stagiaire à la fin de son stage, la durée du stage est déduite de la période d’essai, dans la limite de 50 % de la  durée de la période d’essai légale.
Exemple : une période d’essai est prévue pour 2 mois. Le stagiaire est embauché à la fin d’un stage qui a
duré 4 mois. La période d’essai peut être réduite au maximum de 50 % (50 % de 2 mois, soit 1 mois).
La nouvelle période d’essai sera donc d’un mois.

Pour ce qui concerne les chirurgiens-dentistes salariés qui ont obligatoirement le statut de cadre, ce délai est au maximum de 4 mois (il faut préciser ici que les étudiants-adjoints salariés ne sont pas considérés comme des cadres, car ils n’ont pas encore le diplôme de chirurgien-dentiste). Le renouvellement de cette période d’essai paraît juridiquement contestable pour un praticien salarié puisqu’il n’y a pas d’accord de branche.
Les durées maximales de la période d’essai sont détaillées dans le tableau ci-dessous.
Attention, la période d’essai ne se présume pas : le contrat de travail (ou la lettre d’engagement) doit indiquer que le salarié est soumis à une période d’essai et que celle-ci peut être renouvelée éventuellement. Si rien n’est indiqué sur le contrat de travail (ou sur la lettre d’engagement), le salarié peut considérer qu’il est embauché sans période d’essai.

Le décompte
Lorsque l’entreprise exprime la période d’essai en semaines ou en mois, le décompte se fait en semaines civiles (du lundi au dimanche) ou en mois calendaires (tout le mois compte).
Lorsque la période est exprimée en jours, il faudra décompter en jours calendaires (tous les jours de la semaine, du lundi au dimanche inclus).
Exemples :
– une période d’essai de 2 mois qui débute le 9 juillet 2014 se terminera le 8 septembre 2014 à minuit (même si c’est un samedi !) ; – une période d’essai de 10 jours qui débute le 16 juillet 2014 se terminera le 25 juillet 2014 à minuit.
Soulignons que la maladie ou l’accident de travail durant l’essai a pour effet de suspendre la période d’essai.

La rupture
Modalités
Si la période d’essai peut être rompue à tout moment par les deux parties, le Code du travail impose cependant le respect d’une période de préavis ou d’un délai de prévenance. C’est le cas notamment lorsque la rupture de la période d’essai est effectuée à la demande de l’employeur. Ce dernier doit alors suivre un certain nombre de règles parmi lesquelles figure la nécessité de prévenir le salarié concerné 24 heures à l’avance s’il est au sein de l’entreprise depuis moins de 8 jours, 48 heures à l’avance lorsque sa présence est comprise entre 8 jours et 1 mois, 2 semaines après 1 mois, et 1 mois pour l’équivalent de 3 mois de période d’essai effectués. De son côté, le salarié à l’initiative d’une rupture de période d’essai doit respecter un préavis de 24 heures si sa présence dans l’entreprise est inférieure à 8 jours, ou de 48 heures pour une période supérieure.

Décision
L’employeur peut prendre l’initiative de rompre la période d’essai de son salarié de son salarié même si celui-ci est absent de l’entreprise pour cause de maladie ou de congés. Néanmoins, il ne peut prendre cette décision si son employé bénéficie d’un arrêt pour une maladie professionnelle ou pour un accident du travail. Dans ces deux cas, il faut attendre le retour du salarié. En la matière, les tribunaux n’hésitent pas à sanctionner les ruptures abusives de période d’essai. Une rupture reconnue comme injustifiée est considérée comme étant un licenciement abusif. Dans ce cas, l’employeur peut être amené à verser des dommages et intérêts au salarié concerné.

Non-respect du délai de prévenance
La loi instaurant le délai de prévenance n’avait pas prévu de sanction applicable lorsque l’employeur ne respecte pas cette obligation vis-à-vis du salarié dont la période d’essai est rompue.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 23 janvier 2013 (n° de pourvoi 11-23428), a admis qu’un employeur pouvait rompre la période d’essai jusqu’au dernier jour prévu pour cette période dans le contrat de travail ou dans le renouvellement accepté par le salarié sous deux conditions cumulatives :
– exonérer le salarié de travail pendant le délai de prévenance dépassant la date initiale de fin de période d’essai ; – et néanmoins lui payer cette partie de délai de prévenance dépassant la date initiale de fin de période d’essai En l’espèce, la salariée avait été engagée le 15 octobre 2008 avec une période d’essai de trois mois qui a été renouvelée pour la même durée ; l’employeur a mis fin à l’essai le 14 avril 2009, avisant la salariée qu’elle bénéficierait d’un délai de prévenance d’un mois à compter de cette date, cesserait son activité dès le 14 avril 2009 mais percevrait son salaire jusqu’au 14 mai 2009.
À la suite de cet arrêt, le gouvernement a pris une ordonnance (n° 2014-699 du 26 juin 2014) qui précise que « lorsque le délai de prévenance n’a pas été respecté, son inexécution ouvre droit pour le salarié, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. Cette indemnité est égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du délai de prévenance, indemnité compensatrice de congés payés comprise ».
En revanche, si l’employeur met fin trop tard à la période d’essai, la rupture pourra être requalifiée à la demande du salarié en licenciement sans cause réelle et sérieuse par le Conseil de Prud’hommes. C’est ce qu’a rappelé la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt très récent du 5 novembre 2014 (n° 13-18114). Dans cette affaire, un employeur désireux de respecter le délai légal de prévenance avait mis fin par courrier du 8 avril à la période d’essai de son salarié à compter du 22 avril, alors que celle-ci s’achevait le 16 ; dès le 17 avril, le salarié bénéficiait donc d’un contrat à durée indéterminée qui ne pouvait être rompu que par un licenciement.

Moralité : il vaut mieux ne pas respecter le délai de prévenance si on l’a oublié et mettre fin au contrat au plus tard le dernier jour prévu pour la période d’essai, car les conséquences du non-respect du délai de prévenance (voir plus haut) sont infiniment moins graves que celle de la rupture après la fin de la période d’essai.

Période d’essai et CDD
La mise en place d’une période d’essai est également possible dans un contrat à durée déterminée (CDD), mais elle est évidemment beaucoup plus courte et n’est pas renouvelable. Ainsi, pour les employés de cabinet dentaire, en cas de CDD, la période d’essai est d’un jour par semaine avec un maximum de 2 semaines pour les contrats dont la durée est au plus égale à 6 mois. Elle est d’un mois maximum pour les contrats de plus de 6 mois.

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