La Cour des comptes veut plafonner les tarifs de prothèse et favoriser le développement des réseaux dentaires

  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire
Information dentaire
Dans un rapport rendu public le 20 septembre, la Cour des comptes analyse durement les politiques publiques de santé bucco-dentaire et regrette que la convention dentaire ne soit pas respectée par la profession.
Ses propositions relèvent du remède de cheval.

Hasard ? Difficile d’y croire… Deux jours avant l’ouverture officielle des négociations conventionnelles entre les syndicats, les complémentaires santé et l’assurance maladie, prévue le 22 septembre, la Cour des comptes consacre un chapitre entier aux soins bucco-dentaires dans son rapport annuel sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale. Et elle n’y va pas de main morte. Selon elle, les pouvoirs publics et l’Assurance maladie, compte tenu de son désengagement financier progressif, mais aussi les complémentaires santé, trop timorées à son goût, n’ont pas su encadrer ce secteur comme elle l’avait suggéré dans un rapport de 2010. La convention dentaire de 2006, reconduite en 2011, puis ses avenants successifs « sont caractérisés par un profond déséquilibre : les engagements pris par la profession n’apparaissent pas à la hauteur des efforts, notamment financiers, consentis par l’Assurance maladie ; de surcroît, ils n’ont pas été respectés, écrit la Cour. Les mesures adoptées par l’Assurance maladie ont davantage répondu aux attentes des chirurgiens- dentistes qu’elles n’ont favorisé l’accès des assurés sociaux aux soins. » Si elle reconnaît des avancées sensibles : l’engagement de la profession dans la campagne de prévention M’T Dents ; la mise en œuvre de la CCAM ; l’organisation d’une permanence des soins arrêtée dans toutes les régions depuis le 1er janvier 2016, « pour le reste, les objectifs convenus n’ont pas été atteints ». Selon les sages de la rue Cambon, en contradiction avec l’engagement de modération des honoraires, de plus en plus de dépassements sont facturés. Leur part dans le total des honoraires est passée de 47,9 % en 2005 à 52,5 % en 2014 (soit 4,7 Mde). Et en dépit des engagements conventionnels, l’inlay-core a supplanté les actes de reconstitution de la dent après que son tarif a été déplafonné. « Alors que la convention prévoyait de porter de 8 en 2006 à 8,8 en 2011 le nombre de reconstitutions dentaires pour 10 inlay-core, leur proportion a au contraire chuté à 5,8 en 2013, selon la Cour. En 2015, les reconstitutions de dents ne font même plus partie des dix soins les plus fréquents, tandis que l’inlay-core est devenu le premier des dix actes à tarif non opposable les plus fréquents. » Autre reproche : le dépassement d’honoraires sur soins conservateurs « totalement abusifs », « mais jamais sanctionnés jusqu’ici » (lire encadré).

Le rapport estime que les pouvoirs publics ont renoncé, jusqu’à présent, à mieux encadrer la qualité et la sécurité des soins bucco-dentaires ainsi que le coût de ces derniers. Il regrette par exemple que la Haute Autorité de Santé (HAS) n’ait pas publié d’études sur les questions dentaires entre 2011 et 2015, alors que les techniques évoluaient rapidement. Il déplore aussi que les prix de fabrication des prothèses ne figurent pas sur les devis…. La Cour espère donc que la prochaine renégociation de la convention nationale offrira « l’opportunité de déterminer un cadre de régulation efficace, et donc contraignant ». Elle fait pour cela des propositions au lance-flammes (lire ci-dessous).

Rien de très nouveau au final. La provocation et l’outrance comme modes d’action. Pas sûr que ce soit très efficace.

Les propositions de la Cour

• Élaborer, au-delà des moins de 18 ans et des femmes enceintes, une stratégie globale de santé bucco-dentaire, « axée sur la prévention et le suivi pour tous, aux objectifs lisibles et mesurables et mobilisant l’ensemble des acteurs concernés ».
• Rendre publique l’accréditation, par la HAS, des cabinets dentaires qui respecteraient la qualité et la sécurité des soins selon une grille prédéfinie.
• Rétablir un plafonnement du tarif des actes prothétiques les plus fréquents, comme la couronne céramo-métallique et l’inlay-core. Adopter un décret pour fixer des plafonds de prise en charge de certains actes dentaires dans les « contrats responsables » des assureurs santé comme la loi le permet.
• Renforcer les contrôles de l’Assurance maladie. « En particulier en analysant systématiquement, via des requêtes automatisées, les données d’activité atypiques ou suscitant des interrogations quant à la réalité des actes pratiqués, en étendant ses contrôles à un nombre accru de praticiens et en accélérant les procédures des enquêtes. »
• Rétablir les dispositions de la loi du 21 juillet 2009, qui rendaient obligatoires l’information du patient sur le prix d’achat de sa prothèse dentaire. « La disparition de cette information et l’opacité du calcul du prix de vente, qui comporte, sans qu’on puisse en distinguer les composantes, le prix d’achat, des quotes-parts d’autres frais variables et de frais fixes et la marge du dentiste font reculer la transparence des prix au détriment des patients. »
• Favoriser le développement des réseaux de soins dentaires. « Le développement des réseaux de soins dentaires est de nature à rendre le secteur plus transparent et plus concurrentiel, dans un domaine où la formation du prix des actes prothétiques n’obéit pas à des mécanismes de marché efficients et conduit à des niveaux de tarification qui ne sont pas supportables par la majorité des patients. »
• Introduire un conventionnement sélectif. Établir « un cahier des charges précis garantissant l’adéquation territoriale et sanitaire de l’offre de soins aux besoins de la population, facilitant l’accès de celle-ci aux soins bucco-dentaires et organisant le contrôle du respect de l’obligation légale de formation continue ».

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