Cela fait maintenant plusieurs mois que Luc nous a quittés. Le vide de son absence est immense, il nous accompagne chaque jour. Tout ce que nous faisons dans le cadre de notre grande famille qu’est la Sapo Implant nous ramène à lui.
Au travers de l’hommage que nous lui rendons aujourd’hui, je voudrais m’associer à sa famille afin de tous vous remercier de vos condoléances, marques de sympathie et de soutien.
Moi qui l’ai tant côtoyé, qui ai tant partagé avec lui, je voudrais rappeler qui il était et quel a été son parcours. Quelles ont été les rencontres qui ont forgé sa vie, qui ont orienté ses choix.
Luc a passé son doctorat à la faculté de chirurgie dentaire de Montrouge. Il s’est installé tôt, dès la fin de ses études, à Méziere-sur-Seine, dans les Yvelines.
Il était très attaché à ses origines périgourdines, dont il était très fier.
Le début de son activité professionnelle a été celui d’un omnipraticien qui lui a permis d’acquérir l’expérience du traitement global des patients.
Luc a eu très tôt la passion de l’implantologie, il a vite compris et mesuré la révolution que cela allait représenter pour nos patients et dans notre exercice professionnel.
La vie est faite de hasard et d’opportunité ; c’est ainsi que j’ai rencontré Luc.
C’était il y a maintenant vingt-cinq ans. Le lieu de notre rencontre n’était pas anodin, car il a donné la dimension de notre parcours, nous a montré la voie. Nous étions alors en 1992 dans le temple de l’implantologie qu’était la clinique Brånemark.
Nous savions, ou en tout cas nous imaginions le symbole que représentait la rencontre avec le professeur Brånemark, un soir à Göteborg. Elle nous a marqués pour les années à venir. Une sorte de pacte inconscient était né alors entre nous, dont nous ignorions l’issue.
Ainsi, à notre retour de la clinique Brånemark, nous avons organisé le premier cours de pose d’implants de Brånemark associé aux dissections anatomiques dans le cadre de la Sapo fondée par le Professeur Jean-François Gaudy.
C’est alors qu’a débuté la carrière d’enseignant de Luc. Le professeur Gaudy nous a transmis le virus de l’enseignement et du partage des connaissances. Puis, pierre après pierre, nous avons alors commencé à bâtir ensemble ce qui allait devenir la Sapo Implant dont le premier cursus démarra en mars 2000.
Il avait aussi la fierté de représenter l’université Paris Descartes, d’en être un acteur et un ambassadeur au travers des conférences nationales et internationales que nous donnions.
Grâce à la Sapo Implant, la vie de Luc a été transformée, jour après jour, cursus après cursus, il a tissé ce réseau d’amitiés, d’échanges professionnels, de fidélité. Il y a aussi rencontré sa future femme, Pascale.
Tous ont le souvenir de son charisme, de son enthousiasme, de ses réparties quelquefois cinglantes, montrant dans toute la dimension du personnage qu’il était. Très tôt, il a participé avec l’équipe aux travaux d’anatomie appliqués à la chirurgie implantaire. De ces travaux sont issus deux livres autour du professeur Jean-François Gaudy. Il a été l’un des artisans du succès de ces ouvrages.
Parallèlement à son évolution dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, il prenait sa dimension de clinicien, d’expert dans tous les sens du terme. Il l’était auprès des tribunaux.
En même temps qu’évoluait son activité d’enseignant, il a développé son exercice privé autour d’un réseau de correspondants avec lesquels il travaillait étroitement, donnant ainsi la mesure de son expérience professionnelle.
Il a été l’un des pionniers de la mise en charge immédiate, dès 2002, et de la chirurgie guidée après notre passage à Göteborg autour du professeur Ingvar Ericsson. De là découlera un travail de recherche sur la précision en chirurgie guidée, des publications internationales en collaboration avec l’Université de Chalmers.
Au milieu des années 2000 a débuté sa carrière de conférencier international. Ce fut le début d’une période intense de voyages et conférences, de rencontres. Il a tissé des liens avec de grands noms de l’implantologie internationale, de Bertil Friberg à Stephen Lundgren en passant par nos amis libanais, les Professeurs Barakat et Tawil.
Le temps a semblé s’accélérer alors, comme un message pour nous dire qu’il était compté. Il nous a menés à la rencontre des autres : Las Vegas, New York, Beyrouth, Varsovie, Pragues, Londres, Vérone, Naples, Bologne, Istanbul, Damas… Que de souvenirs partagés !
Il m’a dit avant de partir qu’il n’avait pas de regrets ; ces années en sont la marque.
Et puis, surtout, il a gardé le contact avec nos chers Sapistes. Quels grands moments que les continuums où, année après année, le groupe grandissait. Il avait le souci toujours de les retrouver pour écouter les demandes et, surtout, y répondre.
Personne n’oubliera les dix ans de Sapo Implant dans le grand auditorium de la bibliothèque François Mitterrand. Je le revois encore si heureux d’être là, si fier encore de l’hommage que lui rendaient les Sapistes. Qu’ils en soient tous remerciés.
Luc, tu nous laisses le souvenir de ta volonté, de ta passion de transmettre.
Nous ne t’oublierons jamais.
Bernard Cannas
C’était en 1992, à Göteborg, en Suède. Un groupe de Français allaient, et pour certains retournaient, à la Brånemark Clinic. La passion pour cette découverte faite par le Professeur Brånemark et appelée ostéointégration nous animait. Cette passion était communicative et l’enthousiasme de travailler aux côtés de Bertil Friberg au bloc opératoire et de suivre les cours de Torsten Jemt créait au sein du groupe une véritable émulation.
La vie a ses mystères, comme les relations humaines. Comment se font les rapprochements, les sympathies, comment se nouent des liens qui seront désormais indestructibles ? Pour ma part, j’ai été très marqué par Goethe et je suis persuadé que les liens se créent par « Affinités électives », et même qu’ils existaient avant la rencontre, et que les individus se reconnaissent au moment de cette rencontre.
Dans ce groupe, il y avait deux jeunes praticiens, Bernard Cannas et Luc Gillot. Nos affinités furent immédiates, la passion pour la connaissance, l’humanité, la droiture, la sensibilité ont fait que nous ne nous sommes plus quittés, toujours en relation, pour confronter les idées, transmettre ce que nous avons appris, raviver la passion, se soutenir dans les moments difficiles… J’étais l’aîné, j’avais découvert des disciples, des prolongements qui rapidement sont allés plus vite et plus loin que moi. Nous ne nous sommes plus perdus de vue… à une injustice près : le plus jeune d’entre nous nous a quittés trop rapidement, ce n’était pas son tour, mais c’est lui qui est parti en premier. Luc est parti, au-delà du monde que nous connaissons. Peut-être en sait-il plus maintenant, peut-être sait-il ce que nous ne savons pas…
Oui, Luc est parti, emporté par ce qu’il n’a cessé de combattre, la maladie !
Au-delà de notre peine, qui est immense, nous savons qu’il est parti avec un sentiment très fort : il a fait de son passage sur terre une œuvre utile, il a accompli une mission qu’il s’était fixée. Dans la grande chaîne, ininterrompue, de l’aventure humaine, il a certes transmis la vie, ce qui est notre grand bonheur, mais il a aussi transmis l’essence de notre évolution : la connaissance, la recherche d’une connaissance toujours plus étendue, toujours plus solide. Dans un domaine magnifique qui est la santé, le bien-être des autres êtres humains.
Dès notre première rencontre, j’ai compris qu’il fallait associer Luc Gillot et Bernard Cannas comme deux êtres ne faisant qu’un, dans une amitié fraternelle d’une limpidité absolue et exemplaire. Dès cette première rencontre, Luc m’est apparu comme un être assoiffé de connaissances, assoiffé de vie, trop heureux d’être et de vivre dans ce monde en évolution permanente, trop avide de ne vouloir rien manquer, toujours prêt à partir, à aller partout pour découvrir et apprendre par la communication. Il a côtoyé les plus grands de notre discipline et tous l’ont adopté et aimé. Apprendre, toujours apprendre, mais apprendre en profondeur, par la compréhension, par l’expérimentation. Oui, comprendre les phénomènes qui nous échappent, ce qui est caché derrière les évidences de tout le monde.
Voilà ce qu’était Luc Gillot, et il avait encore tant à faire, tant à découvrir, tant à partager !
En parallèle, ce qui, probablement, a été le vrai ciment de notre amitié affective, c’est aussi cette soif de transmettre aux autres, ce que nous avons eu tant de peine à assimiler. Et Luc a toujours été un passionné de la transmission des connaissances, sa recherche de la compréhension des phénomènes n’avait d’égal que sa recherche des moyens pour transmettre ce qu’il avait acquis. Ses élèves, et il en a eu des milliers à travers le monde, savent ce qu’ils lui doivent. Il avait le don de rendre simples et compréhensibles des choses complexes. Il avait le don de passionner les auditoires là où d’autres lassent. Nous avons tous profité de ses qualités.
Luc nous manquera beaucoup, c’est certain. Mais au-delà de la peine et du chagrin, je pense très profondément que ce que je n’oublierai pas, ce que nous n’oublierons pas, pendant son court passage parmi les humains, c’est la chance, le bonheur, d’avoir rencontré un Homme de sa qualité, de l’avoir accompagné, d’avoir partagé mille choses de la vie, d’avoir été entraîné par sa vitalité, d’avoir été réchauffé par son humanité, d’avoir été stimulé par son entrain, d’avoir – pour moi – été réconfortés dans les moments difficiles que nous réserve la vie.
Paul Mariani
Professeur des Universités
C’est avec beaucoup de tristesse que je rends aujourd’hui hommage à Luc Gillot, l’ami perdusi rapidement, trop jeune, trop tôt, bien trop tôt.
Ceux qui ne le connaissaient pas personnellement connaissent, bien sûr, la Sapo Implant, remarquable organisme de formation, par lequel, avec son acolyte Bernard Cannas, il a formé intelligemment des centaines de dentistes à l’implantologie. Il a vécu passionnément son métier de praticien et d’enseignant, a travaillé sans relâche à améliorer notre pratique et a donné beaucoup de temps et d’énergie à la compréhension de l’implantologie.
Avec Bernard, ils ont su développer l’enseignement de l’anatomie appliquée à l’implantologie ainsi que, entre autres, l’apprentissage des techniques de chirurgie guidée.
Avec d’autres, ils ont développé un cours exceptionnel permettant aux praticiens d’être parfaitement rassurés dans leurs premiers cas. La Sapo remporte un énorme succès depuis des années et Luc et Bernard peuvent en être très fiers.
À titre personnel, nous nous sommes croisés à différentes reprises pendant les années 90, comme on le fait avec beaucoup de confrères. Puis, lors d’un voyage à Göteborg en 1999, nous avons eu l’occasion de mieux nous connaître.
Luc était prudent dans ses rapports aux autres, et au fil des années les masques sont tombés, et j’ai pu apprécier un homme plein d’humanité, de respect, mais aussi de doutes. Un homme cherchant à bien faire et à faire le bien,
Il aimait peu les compromis et encore moins la médiocrité. Il recherchait la discussion et les joutes oratoires.
Souvent, nous nous sommes appelés pour parler de l’actualité professionnelle, de nos vies… On avait la dent dure, on a ri, on a râlé, on a aussi partagé.
Un jour d’automne 2012, il nous a appris la nouvelle de sa maladie. Pendant un an presque jour pour jour, il a lutté sans relâche, avec dignité, avec l’envie de vivre. Pascale tout près de lui, nous donnait le feu vert quand on pouvait l’appeler, sa voix parfois tremblante en disait long… Allez, Luc, ça va aller !
Comme il a été difficile pour lui de s’arrêter de travailler, de soigner, d’enseigner.
On devait partir en vacances en mars ensemble, cela n’a pas été possible…
Avec Pascale et Bernard, en juillet, il est venu à Cannes pour un dernier tour de piste de conférencier, trop fatigué pour parler, Bernard a assuré, comme toujours.
Je crois qu’il a été heureux d’être là, avec nous tous, pour le déjeuner, délicieux moments partagés avec les deux Pascale, Paul, Bernard et Jean-Pierre.
Nous nous sommes parlé sur Skype en août pendant nos vacances respectives, cela n’allait pas fort…, il s’accrochait, on s’est envoyé des SMS, je n’arrive pas à les effacer…
Huit jours avant de partir, il apprend que c’est fichu… On partage un dernier moment à l’hôpital, quelques heures à se parler, Luc plein de courage, de lucidité, de sérénité, Adieu l’ami.
Franck Bonnet
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