Fraudes à l’assurance maladie : des contrôles à venir pour les chirurgiens-dentistes

  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire n°36 - 25 octobre 2023
Information dentaire

Des fraudes à l’assurance maladie pour près de 150 millions d’euros (M€) ont été détectées et stoppées au cours des six premiers mois de l’année 2023, selon un décompte présenté par la CNAM le 5 octobre. Un résultat en hausse de 30 % par rapport à la même période de 2022, conséquence de « la nouvelle stratégie anti-fraudes » qui a permis « de gagner en efficacité et de s’adapter aux nouvelles formes de fraudes ». De nouveaux outils informatiques comme le datamining (analyses algorithmiques de données de masse) ou des systèmes de détection des comportements atypiques grâce à l’intelligence artificielle sont désormais utilisés par les services spécialisés de l’assurance maladie.

Sur les 146,6 M€ de préjudices stoppés au cours du premier semestre 2023, plus des deux tiers (102,4 M€) portent sur des facturations « frauduleuses » de frais de santé réalisés en ville (consultations, actes, remboursements de soins et de médicaments, etc.). « Cela prend essentiellement la forme d’actes fictifs ou de sur-facturations par des professionnels de santé », précise la CNAM.

Le reste des fraudes détectées concerne les assurés (39,2 M€) et les hôpitaux (13,9 M€). Le nombre de procédures engagées a donc logiquement progressé de 15 % comparé à la même période en 2022 : 3 700 suites contentieuses ont été enclenchées (déconventionnements, plaintes ordinales), dont plus de 1 600 procédures pénales.

L’assurance maladie explique, par ailleurs, avoir procédé à « l’évaluation du montant des préjudices financiers par profession » pour connaître les risques de fraudes auxquels le système de santé est confronté et ainsi prioriser ses actions de contrôle.
Il ressort que pour les chirurgiens-dentistes, le taux de préjudice annuel estimé est compris « entre 2,4 % et 4 % soit un montant compris entre 60 et 96 M€ », qu’il faut mettre en rapport avec les dépenses totales annuelles de près de 4 milliards d’euros remboursés sur les honoraires des chirurgiens-dentistes libéraux.

Pas « d’escrocs par destination »

Les préjudices portent sur le non-respect de la nomenclature ou de la réglementation et les prestations fictives. « Les abus ou détournement de prestations en nature constituent le 3e poste de fraudes, avec par exemple des actes non médicalement justifiés ou une conduite thérapeutique non conformes aux données acquises de la science », détaille la CNAM qui avertit : un nouveau plan de contrôle des chirurgiens-dentistes libéraux « présentant de fortes atypies de facturation » sera lancé d’ici à la fin de l’année 2023. Les réseaux de centres de santé, principalement avec des activités concernées par le 100 % santé (dentaires, ophtalmologie, audioprothèse), font l’objet d’une vigilance particulière. « Les centres dont les coûts facturés par patient excèdent largement ceux des cabinets de professionnels de santé libéraux, pour un même type de suivi, sont sous surveillance étroite. . » Parmi les professions de santé, les chirurgiens-dentistes font figure de « bons élèves » comparés aux masseurs kinésithérapeutes (entre 166 et 234 M€), aux médecins généralistes (150 et 200 M€) et aux spécialistes (140 et 230 M€). La CNAM espère détecter et stopper 380 M€ de fraudes cette année, puis 500 en 2024.

« Les professionnels de santé libéraux ne sont pas des fraudeurs ni des escrocs par destination », ont réagi les Libéraux de santé (LDS) le 13 octobre. Pour l’intersyndicale (10 syndicats dont Les CDF), « il est essentiel de distinguer les erreurs commises par certains professionnels de bonne foi [sur la nomenclature principalement, ndlr], des cas de fraudes volontaires à grande échelle, commises notamment dans des établissements dirigés par des non-professionnels de santé, et qui doivent être lourdement sanctionnées ». Or, la surveillance automatisée des professionnels « est un processus bête et méchant qui ne prend pas en compte le droit à l’erreur ». Les LDS souhaitent que « les mésusages et les erreurs d’interprétation de la nomenclature », soient traités dans le cadre d’une procédure contradictoire.

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