Dans son rapport 2022-2024 publié le 8 avril, la Miviludes alerte sur la progression continue des dérives sectaires dans le domaine de la santé et du bien-être. Ces situations représentent désormais 37 % des signalements reçus, devant les cultes (35 %).
En cause : la prolifération des pratiques de soins non conventionnelles, présentées comme « naturelles » ou « complémentaires ». Certaines sont utilisées pour asseoir une emprise ou détourner les patients de leur parcours médical. Résultat : une perte de chance, notamment en cas de cancer. « Le recours aux pratiques non conventionnelles n’est pas toujours dangereux, mais il peut ouvrir une porte aux dérives sectaires », rappelle la Miviludes.
Les signaux d’alerte se multiplient : installation en maisons de santé dans les zones sous-dotées, formations non reconnues, recommandations dangereuses, plaques professionnelles ambiguës. Même les hôpitaux ne sont pas épargnés. « Aujourd’hui, il est courant de trouver des séances de Reiki, de magnétisme ou encore de “bol tibétain” dans les établissements publics de santé », note la Mission.
En 2024, 45 signalements ont été transmis au parquet (contre 20 en 2021). Les cas recensés incluent jeûnes prolongés, régimes stricts, lithothérapie (soins à base de pierres), usage de stupéfiants, et appareils de pseudo-diagnostic contredisant les examens médicaux (appareil « russe à résonance magnétique »).
Si les pseudo-thérapeutes sont les principaux mis en cause, des professionnels de santé sont également concernés. Sur trois années (2022-2024) les psychologues, psychiatres, psychanalystes et généralistes concentrent 56 % des signalements (12 % pour les généralistes). Suivent psychothérapeutes (14 %), ostéopathes (12 %), kinésithérapeutes, sages-femmes mais aussi chirurgiens-dentistes (3 % – lire ci-dessous).
Une loi adoptée en mai 2024 sanctionne désormais la provocation à l’abandon de soins. La Miviludes rappelle que toute pratique alternative doit être validée par un professionnel de santé et intégrée dans un cadre médical clair. Elle souligne aussi l’importance d’un esprit critique dès l’école et recommande une meilleure formation des soignants aux enjeux éthiques et relationnels du soin
Dérives sectaires en dentaire
Dans le domaine dentaire, la Miviludes listait dans un rapport publié en 2017 les pratiques « les plus couramment rencontrées » pouvant conduire à une dérive sectaire :
– le décodage dentaire. Il permettrait « la lecture des informations portées par les dents, dans l’intention de permettre au patient une prise de conscience d’un problème relationnel traumatisant, conflictuel ». Exemple : si les incisives centrales supérieures sont séparées des latérales, l’enfant se sent seul dans sa famille. Si ce sont les inférieures, il se sent seul dans l’existence… ;
– les constellations dentaires. La pratique se fonde sur une théorie similaire à la première. « La dent, en tant que partie de soi, est un lieu de stockage, en lien avec les mémoires appartenant au système familial. À partir d’une dent se retrouvent des séquences de notre vécu, de celui de nos parents ou aïeux, voire de notre entourage. » L’acte thérapeutique consiste à réparer ses fondements ;
– la dentisterie holistique. Cette technique veut traiter le patient dans sa totalité. Elle englobe le soin de la dent, les aspects psychologiques et « les blocages émotionnels ».
Autant de méthodes qui « peuvent être d’une efficacité redoutable dans le processus d’emprise mentale pouvant conduire certains patients à l’arrêt de leur traitement conventionnel et à des ruptures familiales ».
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