La praticienne a découvert l’existence d’une fiche professionnelle Google My Business ouverte à son insu, comportant ses coordonnées et des avis d’internautes qu’elle estimait dénigrants sur sa pratique professionnelle.
Elle a donc assigné Google en référé pour que le tribunal ordonne la suppression de la fiche sur le fondement de la loi Informatique et libertés qui permet de s’opposer au traitement automatisé de données personnelles. Mais, selon le juge, si les informations mises en ligne portant sur son nom, l’adresse de son lieu d’exercice professionnel ou encore son numéro de téléphone professionnel sont « certes des données à caractère personnel, elles ne relèvent pas pour autant de la sphère privée (…) et l’atteinte au droit des données personnelles n’est pas, à cet égard, manifestement démontrée ». Au reste, Google a fait valoir que ces coordonnées, présentes sur d’autres annuaires consultables sur Internet, lui avaient été vendues par un opérateur téléphonique qui les avait lui-même achetées à l’opérateur de la praticienne…
S’agissant des avis d’internautes, le tribunal considère que l’identification d’un professionnel, quel qu’il soit, comme sujet d’un forum sur lequel les internautes postent leurs avis, « relève d’un intérêt légitime d’information du consommateur ». De surcroît, cette fiche ne contrevient pas à l’interdiction de publicité applicable aux professionnels de santé, n’est pas non plus « soumise à un régime d’autorisation préalable », et les internautes qui laissent des messages ne sont pas liés par le secret médical.
Conclusion du juge : si « la suppression pure et simple de la fiche de la demanderesse contreviendrait au principe de la liberté d’expression », celle-ci a tout de même la possibilité d’intenter un recours contre les internautes « qui porteraient atteinte à son honneur ou à sa réputation ou qui publieraient une critique excessive et fautive de ses services » sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 ou du dénigrement en application de l’article 1240 du Code civil. Rien d’autre.
Pas encore de jurisprudence
Il s’agit d’une décision prise en référé, c’est-à-dire en urgence, pour faire cesser un trouble, et non sur le fond. Elle ne fixe donc pas la jurisprudence. D’ailleurs, un an plus tôt, en avril 2018, le même TGI de Paris avait donné gain de cause à un autre chirurgien-dentiste et condamné Google à supprimer la fiche incriminée.
Mais, dans cette affaire, le praticien, qui avait signifié à Google sa volonté de voir supprimer sa fiche avant de l’assigner, avait produit des mails de la société lui proposant de payer pour passer des annonces publicitaires sur cette fiche afin « d’améliorer ses performances ». Le juge s’était alors appuyé sur l’article 226-18-1 du Code pénal qui punit de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 e d’amende le « fait de procéder à un traitement de données à caractère personnel concernant une personne physique malgré l’opposition de cette personne, lorsque ce traitement répond à des fins de prospection, notamment commerciale ».
Une troisième affaire est en cours de jugement en Moselle. Elle concerne cette fois un médecin dont la fiche, ouverte sans son consentement, contenait des propos selon lui diffamants. Il faudra attendre que ces affaires, ou d’autres, soient jugées par la Cour de Cassation pour qu’une jurisprudence se dessine.
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