L'Information Dentaire n°30 - 11 septembre 2024

Lutter ou céder…

«Monsieur, je ne me suis jamais trompé, moi ! » Face à cette affirmation due à un ego surdimensionné renforcé par l’ignorance, j’avoue que ma seule réponse fut de tourner les talons. Ce patient, fort mécontent à la suite d’une erreur de rendez-vous, vivait comme un combat existentiel le fait d’avoir raison. J’avais pris le relais après une longue discussion, stérile, entre lui et l’assistante. Malgré mes excuses, il voulait avoir raison. Je tentais de lui glisser, entre deux éclats de voix, que dans ce genre de situation, nous ne saurions pas qui s’était trompé, de lui ou de nous, et que, finalement, peu importait le responsable de l’erreur, le plus important étant de trouver une solution ensemble. Rien n’y faisait. Je n’avais donc plus qu’à prendre la fuite, le laissant seul avec sa colère. Face à mon dos qui maintenant l’ignorait, il n’avait plus personne à agresser. Comme une balle de tennis sans mur pour rebondir, sa hargne fut asphyxiée.

Parfois, lors d’un conflit, se pose la question de la meilleure attitude : lutter ou céder. L’abandon lors d’une joute orale s’apparente pour certains à une défaite, alors que cela permet souvent de sauvegarder sa santé [1, 2]. Cela ne signifie pas qu’il faut céder à tout. Pas d’apologie de la lâcheté, mais seulement un juste choix des combats qui méritent d’être menés, de s’engager.

Vous pourrez lire dans les pages de ce numéro qu’il est possible, sous certaines conditions, de rompre le rapport médical avec un patient quand l’incompatibilité est déclarée. L’incompatibilité entre deux personnes ne veut pas dire que l’une est supérieure à l’autre, juste que l’interaction est impossible, que les codes de fonctionnement sont inconciliables. La séparation reste alors la meilleure relation.

Heureusement, ce genre d’évènements reste exceptionnel. Malgré leur rareté, ils peuvent être temporairement dévastateurs. Aussi, il apparaît intéressant de s’y préparer, d’y réfléchir pour anticiper et savoir que l’oubli est souvent l’option salvatrice la plus appropriée. La relation peut générer de la discussion, de la contradiction, pas de l’agression. Le respect est une puissante source de paix. Bonne lecture.

Michel Bartala, Rédacteur en chef