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Information dentaire

L'Information Dentaire n°41 - 25 novembre 2020

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Avant-Propos

Décrypter et percer les secrets de la couleur de la dent naturelle I Lire ci-dessous >
Romain Ceinos

Éditorial
Un monde en couleur I Lire ci-dessous
Jean-François Lasserre

Actualités

Revue de presse

Influence de l’émail et couleur des dents naturelles I Lire >
Pascal De March

Presse médicale spécialisée
Philippe Léonard

Actualité hebdo
Nicolas Fontenelle

Spécial Couleur

La couleur des dents naturelles : bases fondamentales I Lire >
Romain Ceinos, Jean-François Lasserre

La dent dyschromiée : approche diagnostique I Lire >
Clara Ramel Fedelich, Lanrent Elbeze

Apport de la spectrophotométrie pendant l’éclaircissement dentaire I Lire >
Jean-Pierre Attal, Kevin Gnanguenon

Approche contemporaine de l’éclaircissement de la dent dépulpée I Lire >
Mélanie Giallo

Rendre sa couleur à l’émail… Les clés de l’érosion-infiltration résineuse à visée esthétique I Lire >
Patrick Rouas, Mathieu Contrepois,  Wallid Boujemaa, Romain Ceinos, Elsa Garot

Relevé de la couleur à visée restauratrice directe I LIre >
Romain Ceinos, Panaghiotis Bazos, Javier Tapia

Culture

L’invention du surréalisme I Lire >
Thierry Leroux


Avant-Propos

« La couleur est par excellence la partie de l’art qui détient le don magique. Alors que le sujet, la forme, la ligne s’adressent d’abord à la pensée, la couleur n’a aucun sens pour l’intelligence, mais elle a tous les pouvoirs sur la sensibilité »

Eugène Delacroix

Romain Ceinos
MCU-PH Réhabilitation Orale – Odontologie Restauratrice,
Université Côte d’Azur, UFR d’Odontologie de Nice
Président de la BioTeam Nice
Membre du collectif international Bio_Emulation
Coordinateur scientifique du numéro

Lorsque l’on m’a confié la coordination de ce numéro spécial de L’Information Dentaire, j’ai accepté avec joie et fébrilité. Nous vivons une crise sanitaire sans précédent dont les répercussions multiples au sein de nos vies professionnelles et personnelles ont de quoi nous rendre maussades… La thématique de la « couleur » s’est imposée à moi comme le fil directeur idéal pour partager nos connaissances de l’Art dentaire tout en luttant contre la mélancolie ambiante. L’optimiste n’est pas celui qui ignore les difficultés, mais celui qui décide de chercher des solutions !

La couleur est au centre de nos vies, elle a un impact sur notre perception de l’espace, notre ressenti esthétique et même sur notre humeur. La théorisation de la couleur, son étude, aussi bien physique que psycho-affective, en font un sujet de recherche passionnant et inépuisable. Pour autant la couleur reste un défi, voire parfois une source de frustration, dans notre pratique. Un sourire, dit esthétique, fait intervenir de nombreux paramètres tels la forme, la couleur, la position des dents et leur interaction avec le cadre gingivo-labial au sein du visage. Bien que chaque chaînon puisse être considéré individuellement, tous les composants doivent agir ensemble pour créer une sensation d’harmonie. La littérature nous informe cependant que la couleur des dents reste pour nos patients l’un des facteurs les plus importants dans l’appréciation de leur sourire et participe grandement au degré de satisfaction ou d’insatisfaction de nos thérapeutiques. La couleur est donc au centre de l’attention de nos patients.

Pour surmonter efficacement les défis associés à la sélection précise d’une « teinte » (terme impropre, mais dont le barbarisme sémantique s’est imposé au fil des années au sein de notre profession), sa reproduction ou sa correction, il est essentiel que les chirurgiens-dentistes comprennent à la fois la science et l’art de la couleur.
Ce numéro spécial réunit un ensemble d’experts nationaux et internationaux, tous animés par la même passion : décrypter et percer les secrets de la couleur des dents naturelles pour mettre leurs connaissances au service du patient.

Je profite de ces quelques lignes pour remercier tous ces auteurs talentueux qui ont accepté de participer à ce numéro « Spécial Couleur, une dentisterie tout en nuances ». Une pensée toute particulière pour le Dr Jean-François Lasserre, qui m’a fait le grand plaisir de rédiger l’éditorial de cette édition et m’a fait l’honneur de m’épauler avec bienveillance dans la rédaction d’un article.

Je vous souhaite à toutes et tous une bonne lecture… et beaucoup de couleurs dans vos vies !


Éditorial

Un monde  en couleurs

Jean-François Lasserre

MCU-PH, Université de Bordeaux
Fondateur du groupe de dentisterie esthétique Symbiose
Membre de la Bioteam Bordeaux

Peut-on imaginer un monde sans couleur, sans texture, sans jeux de transparences ? Ce serait sans aucun doute un monde dénaturé et « insipide ». Cette perception si spontanée et agréable du jeu des couleurs de la nature et des objets qui nous entourent s’est construite chez le tout-petit et jusqu’à l’âge adulte, avec le développement et l’apprentissage visuel, devenant de plus en plus performante.

Les informations sensorielles associées et indissociables de la perception des couleurs (tactiles, auditives, odorantes, thermiques et gustatives) permettent l’identification en quelques millisecondes de la nature précise de l’objet approché, et d’une foule de détails s’y rapportant, le rendant sympathique ou dangereux, recherché ou à rejeter. Bien que le fait de « voir » soit un phénomène familier et involontaire, les mécanismes de la perception visuelle sont extrêmement complexes. Ils s’abordent par des connaissances pluridisciplinaires, en particulier celles de la physique corpusculaire et ondulatoire, de la génétique, de la physiologie, de la psychologie et des neurosciences.
Notre vision colorée du monde est déterminée, mais aussi limitée, par nos capacités sensorielles. En effet, elle n’intéresse qu’une très faible partie du spectre électromagnétique qui constitue la lumière au sens large.

La vision humaine repose sur l’existence de quatre types de cellules sensorielles : les cônes R, les cônes V, les cônes B (perception colorée trichromatique rouge/vert/bleu) et les bâtonnets spécialisés dans la vision des tonalités de gris (luminosité) et de basse luminosité (scotopique). Dans le règne animal, la vision de l’homme est performante en termes de couleur, mais son acuité et l’aptitude à la vision nocturne restent moyennes comparées, par exemple, à celles des grands félins qui ont un pouvoir de discrimination bien supérieur alors que leur vision colorée est limitée dans une gamme de tons sépia. Plus surprenant, la vision humaine est incompétente dans l’ultraviolet (UV), alors que dans le monde des insectes, bon nombre d’espèces perçoivent des bandes spectrales UV, comme les abeilles communes, ce qui jouerait un rôle essentiel dans la pollinisation des fleurs. Même si la vision des couleurs est pour nous une aptitude familière, il reste encore beaucoup à découvrir sur son fonctionnement intime, et c’est en partie par la compréhension des anomalies de la vision des couleurs (dyschromatopsies) que s’est faite la progression dans ce domaine.

L’analyse colorimétrique de la dent naturelle est complexe car cette dernière constitue un corps hétérogène, semi-translucide et à surface convexe. La pulpe, la dentine et l’émail y forment des combinaisons de dégradés et de nombreux effets colorés. Les phénomènes optiques de transmission, d’absorption et de réflexions lumineuses qui s’y développent rendent difficiles l’évaluation de sa couleur et, par la suite, sa communication au laboratoire.

Son choix n’intéresse d’ailleurs que peu les praticiens. Il est en effet surprenant de voir que la plupart des cabinets dentaires travaillent encore avec le teintier Vitapan® créé en 1956 (renommé Vitapan Classical® en 1995), alors qu’il existe depuis plusieurs années des systèmes innovants qui optimisent le choix visuel ou qui permettent une mesure instrumentale objective. Cependant, le plus grand défi reste la reproduction fidèle, en techniques restauratrices (composite ou céramique) de la couleur des dents naturelles, tant le nombre de variables intervenant sur le résultat final est important. Rappelons cependant que le succès reste toujours très dépendant de l’expérience et du sens artistique du praticien et du prothésiste.

Ce numéro « spécial couleur », mené par une jeune génération d’enseignants et de cliniciens passionnés, est une belle opportunité pour vous de confirmer ou de compléter vos connaissances.

La couleur dans sa détermination, sa transmission et sa reproduction, est un domaine en permanente évolution technologique.
Je vous souhaite une excellente lecture.