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Editorial
Décider !
Ce matin, tout semblait pourtant bien se passer : les patients étaient à l’heure, agréables, et les actes ne posaient pas de difficulté. En fin de matinée, le temps allait s’assombrir ; ma douce journée allait subir un violent orage cérébral, les remises en question s’abattant sur mes convictions, mes décisions, comme l’eau s’abat sur la terre asséchée. Retour en arrière : une patiente vue en urgence deux jours avant présentait une fistule et une perte d’attache ; la fracture n’était pas visible à la radio, mais le diagnostic me semblait évident. L’urgence assurée, le rendez-vous pour l’extraction avait été programmé pour aujourd’hui. Et là, les loupes devant mes yeux, la dent devant les loupes, je tournais et retournais désespérément cette dent à la recherche d’une trace de fêlure. Avais-je pris la bonne décision ? Réalité ou fiction, cette situation ouvre au moins trois pistes de réflexion.
L’erreur médicale. Une tribune récente* annonce que l’Organisation Mondiale de la Santé la classe parmi les dix premières causes de décès en médecine. Heureusement, dans notre spécialité, les conséquences des jugements diagnostiques dysfonctionnels sont rarement fatales pour le patient, mais le sont pour l’organe dentaire. Ces erreurs sont multifactorielles, mélangeant de façon non exhaustive des facteurs techniques, organisationnels et humains. L’accident arrive souvent par la concordance d’éléments malheureux conjuguant le matériel et l’émotionnel.
La formation. Elle reste l’un des paramètres pour limiter les actes erronés. Elle doit impérativement associer l’acquisition et la répétition de démarches techniques à l’entraînement à la réflexion, à l’analyse des paramètres cliniques. Ainsi, si l’évolution de la formation continue semble s’accélérer vers le « seul(e), chez soi, quand on veut », il me semble que la discussion et le partage d’idées permis par « le présentiel » restent utiles, nécessaires.
La décision. Décider, c’est forcément s’engager. Nous côtoyons, entendons régulièrement des personnes promptes et aptes à critiquer, mais beaucoup moins capables de décider. La décision exige réflexion, anticipation, et ses conséquences conduisent à son évaluation.
Récemment, ces deux derniers points ont été réunis dans un communiqué diffusé par l’ADF. Ses responsables ont évalué tous les paramètres, pour décider, pour la première fois de reporter leur congrès annuel. La protection sanitaire est prioritaire.
Les décisions sont l’empreinte des réflexions.
Bonne lecture.
Michel Bartala, Rédacteur en chef
* Le monde. Sciences et médecines. 23/9/20. Merci à Franck Renouard de m’avoir fait découvrir ce texte.
