Rubrique de la SFHAD. Société Française d’Histoire de l’Art Dentaire
Isidor Beutelrock naît en Bavière en 1847. C’est le fils d’un horloger qui, après son apprentissage d’horlogerie, se tourne vers la dentisterie pour s’installer à Munich. Passionné de mécanique, il est l’un des premiers utilisateurs du tour à pédale de Morrison dès 1872. L’instrumentation radiculaire étant rudimentaire, il se met à concevoir des instruments à canaux manuels, mais aussi parfois mécanisés comme le fameux foret Beutelrock® dont il fabrique lui-même les prototypes avec ses tours d’horloger.
Encouragé par ses confrères, il se lance dans une production industrielle avec une petite fabrique au centre de Munich. Il sort toute une instrumentation canalaire avec une flexibilité et une élasticité remarquables qui fait rapidement la réputation de la firme. Dans les années 1900, il élargit encore sa gamme d’instrumentation en collaboration avec le Pr Walkhoff : ce sont vraiment les débuts de l’endodontie moderne. À sa mort, en 1914, son fils prend sa succession pour de nombreuses années de prospérité.
Le concept des traitements radiculaires
Dans les années 1880, on sait depuis longtemps qu’il est préférable de ne pas atteindre la pulpe et, en cas d’effraction, de réaliser en priorité un coiffage pulpaire. On peut même aller jusqu’à l’obturation complète de la chambre avec plus ou moins le début des entrées radiculaires pour tenter de bénéficier des faveurs de la nature. On connaît trop les échecs des traitements radiculaires.
En cas d’atteinte radiculaire, une difficile obturation canalaire est nécessaire. On passe alors les « extirpateurs de la pulpe » montés sur manche, comme les tire-nerfs du Dr Arrington ou de Donalson. Sont aussi disponibles toutes sortes de fins instruments de style racleurs, limes, mini-forets, et instruments à ébarbures toujours d’actualité. À l’aide de ces outils, on dégage les débris pulpaires, on nettoie en élargissant le canal radiculaire.
Manuellement, on essaye d’atteindre l’extrémité apicale. Pour faciliter l’accès et limiter la courbure instrumentale, on agrandit largement, souvent mécaniquement, l’entrée canalaire pour permettre une obturation ou préparer un espace pour un tenon : c’est avec l’usage du tour à pied, les vrais débuts de l’endodontie mécanisée. Le canal est désinfecté à la créosote.
Vient ensuite l’obturation radiculaire réalisée de préférence par aurification en utilisant des feuilles d’or enroulées autour de très fins fouloirs. L’obturation radiculaire à l’amalgame d’argent se montre difficile à effectuer. En revanche, de nombreux praticiens utilisent la pâte de Hill : c’est une pâte à base de gutta percha à laquelle est incorporée plus ou moins de poudre constituée à base de chaux vive pour 50 %, de quartz pour 25 % et de feldspath pour 25 %. Cette préparation est chauffée, ramollie et tassée par de fins fouloirs de type spreaders. Nous sommes là déjà proches des techniques actuelles d’obturations.
Les instruments mécanisés grâce au tour à pédale font gagner beaucoup de temps et d’effort. Ils deviennent courants en endodontie. Les forets type Beutelrock® sont souvent utilisés, mais leur limitation d’adaptabilité à certains parcours canalaires courbés en fait parfois des instruments trop fragiles.
Il faudra cependant attendre plus d’un siècle pour que les endodontistes du XXIe siècle puissent disposer d’une instrumentation dotée d’une qualité métallurgique exceptionnelle permettant, entre autres, l’exécution des techniques type crown-down.
En observant ces ensembles d’instruments canalaires des années 1880-1900, on ne peut être que stupéfait par les nombreuses formes instrumentales toujours utilisées 130 ans plus tard !
N’oublions pas, surtout en les utilisant, que derrière les noms des instruments couramment employés : Lentulo, Peeso, Gates, Mooser, Largo se cachent, comme pour Beutelrock® les noms de praticiens, souvent géniaux innovateurs, à l’origine de ces instruments.
Pour plus d’informations :
www.biusante.parisdescartes.fr/sfhad
www.biusante.parisdescartes.fr/aspad
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