En France, 25 % de la population adulte fume tous les jours [1]. Les liens entre le tabagisme et plusieurs maladies chroniques sont bien établis et le tabagisme est directement impliqué dans une grande partie des affections bucco-dentaires, notamment les cancers de la cavité buccale [2]. Cela confère aux chirurgiens-dentistes un rôle central dans la délivrance de conseils et de soutien en matière de sevrage tabagique, rôle affiché par la Haute Autorité de Santé depuis 2014 [3]. La loi santé de 2016 a rappelé aux chirurgiens-dentistes leur possibilité de prescription des substituts nicotiniques [4], dont certains sont pris en charge à 65 % par l’assurance maladie depuis 2019 [5]. L’approche recommandée, « 5A », consiste à questionner (Ask) le statut tabagique, à conseiller (Advice) l’arrêt du tabac, à évaluer (Assess) la motivation à arrêter, à aider (Assist) les fumeurs dans leur démarche et à organiser (Arrange) un suivi. Pour les praticiens qui n’ont pas le temps, une approche « 3A » peut être acceptable (Ask, Advice, Act), en donnant des informations sur les services locaux d’aide au sevrage tabagique, en référant vers le médecin traitant ou l’addictologue ou en prescrivant des substituts nicotiniques [6]. Qu’en est-il de la mise en pratique dans les cabinets dentaires de ces recommandations en France ? Nous avons réalisé une étude qualitative pour évaluer les leviers et les barrières à la mise en place de cette approche.
Méthodes et principaux résultats de l’étude qualitative
Des entretiens semi-directifs ont été menés auprès de 12 chirurgiens-dentistes volontaires exerçant en cabinet dentaire omnipratique en Gironde, entre mai et novembre 2020 [7]. Les entretiens, d’une durée de 45 minutes environ, ont été menés à l’aide d’un guide par une sociologue de la santé (SP), soit en face à face, soit par téléphone ou téléconférence. Des observations directes au cours de 15 consultations…