14-18 : un conflit fondateur
Difficile d’éluder la « grande guerre » lorsqu’il s’agit d’évoquer la prothèse maxillo-faciale telle qu’elle est pratiquée au profit des militaires. C’est au cours de ce conflit que, portée par des pionniers, la chirurgie maxillo-faciale se constitue comme une spécialité à part entière. La brutalité des combats laisse alors de nombreux soldats blessés, mutilés, dont certains sont défigurés par les balles et par les éclats projetés par des armes à l’efficacité nouvelle (fig. 1). Le succès parfois tout relatif de thérapeutiques chirurgicales balbutiantes contraint à recourir à des artifices prothétiques originaux pour tenter de réparer ces « gueules cassées ».
Au cours du conflit, parmi les 3 millions de blessés français, on comptera 11 à 14 % d’atteintes du visage et 10 000 à 15 000 grands blessés de la face [1, 2].
Une forme d’atteinte en recrudescence
Cette première guerre mondiale, qui devait être, à ses débuts, rapidement remportée par les troupes françaises, prend une ampleur inattendue et inédite. Le conflit s’enlise et occasionne en quatre années près de 1,5 million de morts chez les poilus. Par comparaison, le précédent conflit franco-prussien de 1870 avait fait moins de 200 000 victimes et la seconde Guerre mondiale occasionnera 250 000 morts parmi les militaires français.
D’abord guerre de mouvement, puis guerre de position dont les fronts sont figés, elle se distingue en ce qu’elle est le premier conflit total, terrestre, naval, sous-marin et aérien, impliquant 70 millions de combattants des cinq continents. Les soldats français, d’abord équipés de tenues héritées du siècle précédent (fig. 2), sont confrontés sur les champs de bataille, puis dans les tranchées (fig. 3), à des armes aux effets ravageurs. Artillerie lourde, mortiers, mines, mitrailleuses, lance-flammes, fusées à balles, obus tirés par millions, dont les éclats…