Quelles sont les difficultés de traitement par kinésithérapie de l’infraclusion ou béance antérieure ?
Hélène Gil : De nombreux articles [1-2] relatent le rapport entre forme et fonction. Une dysfonction peut être à l’origine de contraintes s’exerçant sur les structures squelettiques, dentaires et musculaires. Selon le principe du « couloir dentaire » de Château [3] et du « couloir musculaire » de Cauhépé [4], la langue, à l’intérieur, et la sangle labio-jugale, à l’extérieur, constituent un véritable ensemble musculaire bordant l’arcade alvéolo-dentaire. L’équilibre entre la pression antéro-postérieure de la langue et la pression centripète de l’enveloppe musculaire (orbiculaire et buccinateur) définit une zone où les arcades dentaires peuvent subir des contraintes mécaniques, mais qui s’équilibrent entre elles et s’annulent pour définir une zone neutre. Les dents sont alors en équilibre entre ces deux parois musculaires.
Dans le cadre de l’infraclusion, la langue qui s’interpose entre les arcades dentaires constitue un véritable problème mécanique.
La véritable difficulté de la prise en charge du dysfonctionnement lingual dans le cadre de l’infraclusion peut se définir sur un plan quantitatif et qualitatif.
Le premier plan est quantitatif, car cette béance dentaire signifie une langue trop protrusive, qui n’a évidemment pas effectué son recul, sa verticalisation, signe d’une évolution neuromotrice mature obtenue normalement à partir de trois ans environ [5]. C’est une langue très antériorisée, comme à la naissance. La sévérité de cette malposition linguale relève du temps passé dans cette position interarcades. Sur le plan morphogénétique, c’est essentiellement au niveau de sa position au repos que la langue exercera une influence néfaste sur les arcades dentaires et leur support [6]. En effet, le temps cumulé de pression statique d’une posture linguale erronée…