RÉSUMÉ
La parodontite est une maladie inflammatoire chronique multifactorielle associée à un biofilm bactérien dysbiotique et caractérisée par la destruction progressive des tissus de soutien de la dent [1]. Cette pathologie complexe longtemps restée incomprise fait intervenir des processus biologiques ayant des répercussions sur différents niveaux structurels : cellulaire, tissulaire et systémique. Les modèles de pathogenèse sont des outils aidant à intégrer les nouvelles données disponibles de la recherche scientifique. Généralement sous la forme de représentation schématique, ils mettent en évidence les processus biologiques intervenant dans le déclenchement et dans la résolution des maladies et permettent ainsi une compréhension globale de la maladie. Durant la deuxième partie du XXe siècle jusqu’à nos jours, différents modèles de la pathogenèse des parodontites ont été proposés sur la base des concepts dominants et des données disponibles de la recherche scientifique à ce moment-là. Dans cette revue narrative, nous allons retracer dans l’ordre chronologique les modèles principaux pour souligner les aspects essentiels et l’évolution des connaissances au fil du temps sur l’étiopathogénie des maladies parodontales.
L’hypothèse de la « plaque bactérienne non-spécifique »
Au milieu des années 1960, les études marquantes d’Harald Löe ont démontré de manière convaincante que l’accumulation de plaque précédait directement la gingivite, dans un modèle expérimental humain connu sous le nom de « gingivite expérimentale » [2]. Selon ce modèle, l’inflammation gingivale apparaît trois jours après l’interruption de l’hygiène bucco-dentaire et l’augmentation de la production de fluide créviculaire gingival accompagne les signes cliniques de l’inflammation. Quelques jours après la reprise des pratiques d’hygiène bucco-dentaire, l’inflammation s’atténue et la santé des tissus…