Les dysfonctionnements temporo-mandibulaires (DTM) sont un groupe hétérogène de troubles musculo-squelettiques et neuromusculaires qui impliquent les muscles masticateurs, les articulations temporo-mandibulaires et tous les tissus associés [1, 2]. Leur prévalence mondiale est estimée à 34 % avec une importante variabilité selon le sexe, l’âge, et la localisation géographique [3]. La douleur associée aux DTM (myalgie/arthralgie) peut être aiguë et spontanément résolutive, ou récurrente et, pour des raisons qui restent encore mal comprises [4], 30 à 50 % des patients vont développer une douleur chronique après l’apparition des symptômes initiaux [5-7].
Ces DTM douloureux chroniques (DTMc) coexistent fréquemment avec d’autres troubles douloureux chroniques [8-11], suivant un modèle de multimorbidité [12, 13]. Selon l’European General Practice Research Network (EGPRN), cette coexistence est considérée comme un facteur de mauvaise santé, associée à une augmentation de l’incapacité et à une diminution de la qualité de vie [14]. Cette synergie négative est particulièrement significative lorsque les DTMc sont cooccurrents avec d’autres troubles douloureux chroniques qui partagent certaines caractéristiques, i.e. les « Chronic Overlapping Pain Conditions » (COPCs) [15-20].
L’objectif principal de cet article est de sensibiliser les chirurgiens-dentistes à cette problématique de COPCs qui est peu connue, mais dont l’impact sur la prévention et la gestion des DTMc est majeur [21]. Une première partie propose pour cela de passer en revue les principales caractéristiques des COPCs ainsi que leurs interactions avec les DTMc. Une seconde partie propose ensuite une approche clinique intégrée pour la gestion des patients douloureux chroniques multimorbides.
Caractéristiques des COPCs et interactions avec les DTMc
Dix COPCs sont actuellement répertoriées dans la liste du National Institutes of Health (NIH) Pain…