Carcinomes épidermoïdes sans facteurs carcinogènes ?

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  • Publié le . Paru dans L'Information Dentaire n°28 - 13 juillet 2022 (page 25-27)
Information dentaire
Les carcinomes épidermoïdes (CE) de la muqueuse buccale représentent 95 % des tumeurs malignes de la cavité buccale et 20 à 25 % des cancers des voies aéro-digestives supérieures. Les CE de la muqueuse buccale sont fréquents : plus de 6 000 nouveaux cas chaque année en France. Neuf fois sur dix, le CE se développe sur un terrain éthylo-tabagique. Le taux de survie à 5 ans est de 35 % pour les CE avec métastases et de 75 % pour les CE sans métastases. Le pronostic dépend donc de la précocité du traitement, mais aussi du type histopathologique. On distingue trois formes de CE invasifs : les CE bien différenciés, moyennement différenciés et peu différenciés. Ces derniers sont les moins fréquents, mais les plus agressifs car ils donnent rapidement des métastases. En dehors du terrain éthylo-tabagique, il existe d’autres facteurs carcinogènes comme l’état cicatriciel post-lichénien, post-irradiation ou dû à un syndrome de Plummer-Vinson, la chique de bétel, l’infection à HPV, certaines affections génétiques (par exemple le syndrome de Zinsser-Cole-Engman, l’anémie de Fanconi, le xeroderma pigmentosum), les déficits immunitaires congénitaux ou acquis. Toutefois, dans de rares cas, aucun facteur carcinogène n’est retrouvé.

CAS 1

Motif de la consultation

Patient de 57 ans ayant consulté sur les conseils de son chirurgien-dentiste pour une ulcération jugale droite.

Histoire de la maladie

Le patient avait remarqué, 6 à 8 mois auparavant, la présence d’une ulcération médio-jugale droite. En l’absence de douleurs, il n’avait pas jugé bon de consulter immédiatement. Son hospitalisation récente pour un AVC avait encore retardé la date de la consultation.

Interrogatoire

Le patient était en bonne santé malgré un antécédent d’AVC 2 mois auparavant, qui n’avait guère laissé de séquelles. Comme professeur d’éducation physique, ayant une hygiène de vie rigoureuse, il n’avait jamais fumé ni consommé d’alcool.

Examen clinique

Sur la face interne de la joue droite, on observait une lésion arrondie, assez bien limitée, de 2 cm de diamètre, indolore. Le centre de la lésion était occupé par une large ulcération superficielle, plane, recouverte d’un enduit fibrino-leucocytaire ; les bords, surélevés et légèrement kératosiques, formaient un bourrelet périphérique presque continu. Ce bourrelet, dans sa partie supérieure, présentait une expansion vers le haut, de 5 mm sur 3 mm de large, et cette expansion était recouverte de kératose. La lésion reposait sur une base indurée peu marquée mais nettement présente. Le reste de la muqueuse buccale avait un aspect normal. Aucune adénopathie cervico-faciale n’était retrouvée à la palpation.

Examens paracliniques

La biopsie a montré qu’il s’agissait d’un carcinome épidermoïde ulcéré en surface, bien différencié, qui envahissait par endroits le plan musculaire superficiel, sous forme de lobules, travées et petits agrégats cellulaires, siège d’atypies nucléocytoplasmiques. La tumeur comportait d’assez nombreuses cellules dyskératosiques et globes cornés. Le stroma fibreux contenait par places un discret infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire.

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