Sur un air d’Arlésienne
Longtemps attendue, débattue, fantasmée, la préconisation du masque est là. Tout a été dit sur son utilité. Quant à son acceptation – ultime question au fond –, la réponse demeure en large part aux mains de chacun, et sous sa responsabilité. Le port d’un masque dans l’espace public est inédit pour notre société, contrairement à l’Asie. Nous n’en avions ni l’expérience ni la culture ; hier encore il paraissait insolite, voire incongru, dans nos rues, où il surprenait le regard. En quelques semaines, ce regard a considérablement évolué. Le pays tout entier confiné s’est, dans cet intervalle, partagé entre ceux qui, effrayés, rebutés, sceptiques, excédés, désinvoltes ou inconscients, ne le voient pas d’un bon œil, et ceux qui ne se voient pas sortir sans en porter un, au nom d’un « principe de précaution » confusément ressenti et in fine intuitivement auto décrété. Car, en définitive, tout est affaire ici de credo personnel, l’opinion ayant, au fil d’un temps jugé trop long, perdu confiance dans une doctrine tout aussi introuvable que les masques.
Ce discrédit de la parole officielle pousse chacun à se familiariser à sa façon avec un objet inconnu qu’il vaut mieux apprivoiser et dédramatiser tant que l’on va devoir vivre avec.
L’adoption de ce nouveau comportement, parfois décrit comme une révolution culturelle, un changement anthropologique, s’est opérée de diverses manières : certains en ont simplement pris leur parti, d’autres, soit pénurie soit défi, ont eu l’idée d’en tirer parti. Se retroussant les manches, exhumant une machine oubliée et écumant la toile, ils se sont montrés créatifs pour en faire un accessoire un peu sexy, voire arty, en tout cas personnel.
De leur côté, des maisons de couture, des centres de métiers d’art, des musées, ont répondu à cette tendance. Sans attendre l’Arlésienne d’un modèle standard ne promettant…