Le voir pour le croire ?
Avant la photographie, représenter le réel était le fait des peintres, sinon leur unique but. Aussi longtemps qu’on a vu l’art comme destiné à copier la nature, la ressemblance et la vérité de leurs œuvres ont été les critères de leur talent. Mais à toute époque, certains ont poussé plus loin l’exigence mimétique et sont allés, animés par une malicieuse volonté de créer l’illusion parfaite, jusqu’à fabriquer des pièges optiques capables de confondre le spectateur. Ce farceur de Boilly* s’est fait autour de 1800 le champion de cet art qu’à juste titre il a nommé « trompe-l’œil ». S’il est l’auteur reconnu du terme, il n’est pas celui d’un genre qui se rencontre de l’Antiquité à nos jours, dans une continuité à éclipses qu’éclaire très bien l’exposition du musée Marmottan-Monet. Le fond de l’affaire c’est le relief, donné par jeu d’ombre et lumière. Tout l’art consiste à le reproduire à plat et, sans le secours du volume qu’offrent sculpture et architecture, à faire percevoir une surface bidimensionnelle comme un espace tridimensionnel. N’y parvient pas qui veut, mais pour les plus forts l’illusion est si complète qu’elle ne cède qu’à l’examen le plus rapproché. Au-delà de la vocation décorative des antiques fausses colonnades, moulures ou grisailles, le jeu se corse à la Renaissance avec la maîtrise de la perspective et se raffine avec une codification des thèmes de ces « quodlibets », pêle-mêle grandeur nature sur faux bois où reviennent trophées, flacons, pipes, rubans, porte-lettres, plumes, missives, gravures, livres ouverts. On n’y lit cependant pas aussi facilement, chaque composition contenant un message caché, souvent du type vanités, ou une sorte de rébus, à portée éventuellement politique.
Cette alliance du mensonge et du message est prisée comme un divertissement pour initiés et un jeu de dupes permettant de…