Renaissance très attendue
Au vrai Monopoly de Paris, on donnerait cher pour placer un hôtel sur cette parcelle idéale : à la croisée des boulevards Saint-Michel et Saint-Germain. Bien avant leur percée, ce cœur du Quartier Latin, situé sur l’ancien cardo nord-sud de Lutèce, était déjà stratégique et les abbés de Cluny ont bien misé en y fondant au XIIIe siècle les bases de leur Hôtel de la fin du XVe. Il faut croire que leur ferveur a protégé l’édifice : il a résisté aux saccages de la Révolution comme aux ravages de la spéculation et c’est vraiment par une suite de miracles que nous est parvenu ce joyau de la Renaissance serti dans les ruines romaines, au lieu de céder la place, comme ses voisins, à un temple de la restauration rapide. Très différente est celle, patiente et respectueuse, qu’une campagne de travaux vient d’offrir au musée qu’il abrite. Après un premier volet dédié aux thermes antiques pris dans son enceinte et à l’accueil du public, le musée national du Moyen Âge rouvre ce mois-ci, ayant achevé sa plus grande mue depuis sa création en 1843. Dix ans, deux concours d’architecture et treize millions d’euros y ont été consacrés, mais il couvre plus de mille ans d’art et d’histoire médiévale.
Pimpant, aéré, modernisé avec une élégante sobriété, le musée fait mieux que rouvrir ses portes : il s’ouvre, et de multiples façons. Au quartier vivant qui l’entoure, d’abord, avec son lumineux accueil sur une rue Du Sommerard piétonnisée du boulevard Saint-Michel au bas de la Sorbonne dont elle prolonge le square, son Café des Amis (intérieur et extérieur) abrité dans l’enclos médiéval, sa librairie-boutique ; mais aussi et surtout à une nouvelle génération de visiteurs, promeneurs qui l’ignoraient ou jeune public qu’intimidait sa silhouette d’un autre âge. Tout concourt ici à les connecter simplement à 1 600 œuvres choisies, mises en valeur avec clarté et interactivité…