L’histoire ébranle-t-elle les celtitudes ?
Avouons-le, notre amour d’une Armorique celtique est si entier qu’il nous trouve prêts à croire dur comme granit que sa terre est de toute éternité pétrie de cette grande culture. À certains yeux, menhirs et dolmens ou druides et fées, c’est un peu au fond bonnet blanc et blanche coiffe du moment qu’on danse autour du triskell déjà gravé sur les mégalithes. Pour d’autres en revanche, mettre seulement en question le socle celte est un casus belli. C’est ce qu’à Rennes, au plus que recommandable Musée de Bretagne, ont éprouvé avec stupeur les organisateurs de la récente exposition titrée Celtique ?*. Immédiate levée de boucliers : le point d’interrogation ne passait pas, d’aucuns l’auraient voulu d’exclamation.
Le calme revenu, c’est au Musée qu’il faut retourner pour comprendre ce débat passionné.
Parce que là se lit l’histoire, dans les strates des découvertes archéologiques en sol breton. Depuis ceux qui l’ont foulé les premiers au paléolithique et jusqu’à l’époque moderne, tous les peuples qui y ont vécu ont laissé des traces tangibles de leurs us : pratiques cultuelles, productions, modes d’habitat, organisations sociales, activités commerciales et artistiques. Parmi eux des Celtes, bien sûr, mais aussi des Romains et différents occupants plus ou moins intégrés ou repoussés selon qu’ils paraissaient cousins comme ceux d’outre-Manche ou franchement infréquentables au temps des grandes invasions. Au risque d’un peu chatouiller la corde sensible de la harpe celtique, force est quand même de reconnaître que sa vibration, aussi envoûtante soit-elle, n’est pas un continuum harmonique si sostenuto qu’on peut le rêver. Elle s’accorde à merveille autour de l’âtre avec menhirs et dolmens, mais ceux-ci datent de -5 000 ans à Carnac ; et, dans les foyers de la grotte marine de Menez-Dregan…